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La fin du XVIIe siècle voit apparaître un genre de l’histoire littéraire moins fréquent aujourd’hui : les anas. Il s’agit de recueil d’anecdotes à propos d’un auteur, qui produisent peu à peu une tradition autonome, avec des reprises et des déformations, jusqu’au début du XIXe siècle. L’étude de ces anecdotes est nécessaire, car elles nourrissent des légendes qui plaisent à la mémoire, au risque de déformer l’image d’un auteur, d’en fausser la lecture et l’enseignement. Molière a été particulièrement bien servi, entre notamment : La Vie de M. de Molière de Grimarest (1705) et le Moliérana, Cousin d’Avalon (1801). Les Anecdotes dramatiques de Clément et Laporte (1775) s’imposent entre les deux comme un recueil très général, sur les auteurs, les acteurs et les pièces, et parfois aussi, les représentations. Alexandra Dias Veira en a tiré ici toutes les anecdotes concernant Molière. Cette compilation était une partie de son travail de Master II (2014), sous la direction de Georges Forestier. En éditant le Moliérana, elle cherchait systématiquement la généalogie de chaque micro-récit. Cette précision a été conservée ici, si bien que les anecdotes les plus reprises sont encadrées de références bibliographiques en ordre chronologique, permettant de retracer la tradition.
Molière (Jean-Baptiste Poquelin, si célèbre sous le nom de) né à Paris en 1620, mort en 1673, était fils et petit-fils de Valet-de-chambre Tapissier du Roi. Il passa quatorze ans dans la maison paternelle, où l’on ne songea qu’à lui donner une éducation conforme à son état. Sa famille, qui le destinait à la charge de son père, en obtint pour lui la survivance ; mais il conçut un dessein fort opposé aux vues de ses parents : il demanda instamment, et on lui accorda avec peine, la permission d’aller faire ses études au Collège de Clermont. Il remplit cette carrière dans l’espace de cinq ans, pendant lesquels il contracta une étroite liaison avec Chapelle*, Bernier* et Cyrano*. Chapelle*, aux études de qui l’on avait associé Bernier*, avait pour Précepteur le célèbre Gassendi*, qui voulut bien admettre Poquelin à ses leçons, comme dans la suite il y admit Cyrano*. Les Belles-Lettres avaient orné l’esprit du jeune Poquelin ; les préceptes du Philosophe lui apprirent à raisonner. C’est dans ses leçons, qu’il puisa les principes de justesse, qui lui ont servi de guide dans la plupart de ses ouvrages.
Le voyage de Louis XIII à Narbonne en 1641, interrompit des occupations d’autant plus agréables pour lui, qu’elles étaient de son choix. Son père, devenu infirme, ne pouvant suivre la Cour, son fils y alla remplir les fonctions de sa charge, qu’il a depuis exercée jusqu’à sa mort ; mais à son retour à Paris, il céda à son étoile, qui le destinait à être Paris parmi le Restaurateur de la Comédie.
Le goût pour les Spectacles était presque général en France, depuis que le Cardinal de Richelieu avait accordé une protection distinguée aux poètes dramatiques. Plusieurs sociétés particulières se faisaient un divertissement domestique de jouer la Comédie. Poquelin entra dans une de ces sociétés, qui fut connue sous le nom de l’Illustre Théâtre. Ce fut alors qu’il changea de nom, pour prendre celui de Molière, soit par égard pour ses parents, qui désapprouvaient cette profession, soit pour suivre l’exemple de plusieurs de ses Camarades. La Béjart, Comédienne de Campagne, se l’associa ; et bientôt liés par les mêmes sentiments, leurs intérêts furent communs : ils formèrent de concert une Troupe, et partirent pour Lyon. On y représenta l’Étourdi, qui enleva presque tous les Spectateurs au Théâtre d’une autre Troupe de Comédiens établis dans cette ville. Quelques-uns d’entre eux prirent parti avec Molière, et le suivirent en Languedoc, où il offrit ses services au Prince de Conti*, qui tenait à Béziers les États de la Province. Ce Prince avait connu Molière au Collège, et s’était amusé à Paris des représentationsIllustre Théâtre, qu’il avait plusieurs fois mandé chez lui. L’Étourdi reparut à Béziers avec un nouveau succès ; le Dépit Amoureux et les Précieuses Ridicules y entraînèrent tous les suffrages ; on donna même des applaudissements à quelques Farces, qui, par leur constitution irrégulière, méritaient à peine le nom de Comédies, telles que le Docteur amoureux, les Trois Docteurs Rivaux, etc. Molière les a probablement supprimées, parce qu’il sentit qu’elles ne pourraient lui acquérir le degré de réputation auquel il aspirait. Dans les fréquents voyages qu’il fit à Paris, où il avait dessein de se fixer, il eut accès auprès de Monsieur, qui le présenta au Roi et à la Reine mère. Il joua en présence de leurs Majestés, et obtint la permission de jouer dans la Salle des Gardes du vieux Louvre, et ensuite dans celle du Palais Royal. Enfin sa Troupe fut arrêtée au service du Roi en 1665 ; et ce fut alors, que l’on vit règne le vrai goût de la Comédie sur le Théâtre Français.
Les Pièces de Molière sont l’Étourdi, le Dépit amoureux, les Précieuses ridicules, le Cocu imaginaire, Dom-Garcie de Navarre, l’École des maris, l’École des femmes, les Fâcheux, la Critique de l’École des femmes, l’Impromptu de Versailles, la Princesse d’Élide, le Mariage forcé, le Tartuffe, le Festin de Pierre, l’Amour médecin, le Misanthrope, le Médecin malgré lui, Mélicerte, le Sicilien, Amphytrion, George-Dandin, l’Avare, Pourceaugnac, les Amants magnifiques, Psyché, le Bourgeois Gentilhomme, les Fourberies de Scapin, les Femmes Savantes, la Comtesse d’Escarbagnas, et le Malade imaginaire. Molière avait encore composé, pour la Province et pour Paris, plusieurs petites Farces, comme le Docteur amoureux, le Docteur pédant, les Trois Docteurs Rivaux, le Maître d’École, le Médecin volant, la Jalousie de Barbouillé, la Jalousie du Gros-René, Gorgibus dans le sac, le Fagoteur, le Grand benêt de Fils, Gros-René petit enfant, etc, qui n’ont pas été imprimées.
Le rang que Molière doit occuper dans l’empire littéraire, est réglé depuis longtemps. Pour juger du mérite de ses ouvrages, il suffit de les comparer avec tout ce que l’antiquité offre de plus parfait dans ce genre. Plus l’examen sera approfondi, plus la supériorité de ce grand homme sera reconnue. Il puisa chez les Anciens les premières notions de l’Art qu’il devait perfectionner : il leur dût ce goût sûr, qui éclaira son génie, et lui fit surpasser tous les modèles. Bientôt il n’en voulut avoir d’autre que son génie même. La Nature et les ridicules de son siècle lui parurent une source inépuisable ; il en tira cette foule de tableaux si différents entre eux, et si ressemblants avec les objets qu’il avait voulu peindre. La Comédie prit une nouvelle forme, et s’anoblit entre ces mains. Il étudia le génie des Grands, les fit rire de leurs défauts, et osa substituer nos Marquis aux Esclaves des Anciens. Ces derniers ne jouaient sur leur Théâtre, que la vie commune et bourgeoise ; Molière joua sur le nôtre la Ville et la Cour. Spectateur philosophe, rien n’échappait à ses regards ; il est peu de condition, où il n’ait pas fouillé, peu de vices dans la société qu’il n’ait repris ; personne enfin n’a si bien connu l’art de trouver le ridicule des choses les plus sérieuses. Il allait le saisir où d’autres ne l’eussent pas même soupçonné. Aussi a-t-il joui d’un avantage bien rare, celui de réformer une partie des abus qu’il attaquait. Le jargon des Précieuses ridicules disparut ; celui des Femmes Savantes devint intelligible. On cessa de turlupiner à la Cour, et de se guinder à la Ville. On vit encore, je l’avoue, des avares et des hypocrites ; c’est qu’un vice est plus difficile à réformer qu’un ridicule, et que souvent on en rougit moins. Il faut convenir cependant que, même dans les chefs-d’œuvre de Molière, on souhaiterait un langage plus épuré, et des dénouements plus heureux. On lui reproche encore de s’être trop occupé du Peuple, dans quelques-unes de ses Comédies ; et ce reproche est fondé ; mais il faut envisager les circonstances. Molière, chef d’une Troupe de Comédiens, avait besoin de plaire à la multitude, sans laquelle une pareille Troupe ne peut vivre : il était même souvent obligé d’amuser la Cour, qui, avec un goût délicat, aime encore plus à rire qu’à admirer. Il faut, d’ailleurs, distinguer les genres : le Médecin malgré lui, Pourceaugnac, les Fourberies de Scapin, etc, ne peuvent entrer en parallèle avec le Misanthrope, le Tartuffe, les Femmes Savantes, etc ; mais plus d’un trait, dans ces première productions, décèle le génie qui enfanta les secondes. Molière, en introduisant le bon goût sur la scène comique, n’avait pu en bannir entièrement le mauvais ; il était obligé d’encenser quelquefois l’idole qu’il voulait renverser. En un mot, il imitait la sagesse de certains Législateurs, qui, pour accréditer de bonnes lois, se soumettent eux-mêmes à d’anciens abus.
Pour n’avoir pas trouvé bonne cette ComédieÉlomire Hypocondre. Élomire est l’anagramme de Molière.
C’est dans les Dialogues d’ÉrasmeÉrasme, Didier (Rotterdam v. 1469 – Bâle 1536) : humaniste hollandais. Fils naturel, il entra au couvent des augustin de Steyn où il prononça ses vœux et fut ordonné prêtre. Il poursuivit ses études au collège Montaigu à Paris. Devenu précepteur, il se rendit en Angleterre où il rencontra John Colet dont il suivit les cours de théologie et se lia d’amitié avec Thomas More. L’histoire de sa vie n’est ensuite que celles de ses voyages et de ses œuvres. Entre 1500 et 1506, il écrivit les Adages et le Manuel du chevalier chrétien. Lors de son séjour en Italie (1506-1509), il fréquenta Manuce et apprit le grec, qu’il enseigna ensuite à Cambridge. C’est à cette époque qu’il composa l’Éloge de la folie. Aux Pays-Bas, où il fut un temps conseiller du futur Charles Quint, il écrivit pour lui l’Institution du prince chrétien et publia également son Novum Testamentum et la première édition des Colloques. En 1521, il s’établit à Bâle où, dans la période de conflits religieux entre catholiques et protestants, il écrivit son Essai sur le libre arbitre, où il prit position contre la doctrine de la prédestination, et son De sarcienda Ecclesiae concerdia. […]. (Le Petit Robert des noms propres 2007).Chapuzeau, 1661, L’Académie des femmes : comédie en 3 actes et en vers.Précieuses Ridicules, et aux Femmes Savantes de Molière.
Racine voulant donner sa Tragédie au public, la lut à Corneille qui lui dit : « Cette Pièce me fait voir en vous de grands talents pour la poésie ; mais ces talents ne sont point pour le Tragique ». Il lui conseilla de s’appliquer à tout autre genre. Corneille n’était point jaloux ; mais il préférait Lucain* à Virgile* ; et c’est de lui que Boileau a dit :
Tel excelle à rimer, qui juge sottement Tel s’est fait, par ses vers, admirer dans la Ville, Qui jamais, de Lucain*, n’a distingué Virgile*.
Les Amis de Racine l’avaient assuré de la bonté de sa Pièce ; sur cette confiance, il la fit jouer par la Troupe de Molière ; et la Pièce tomba. Il s’en plaignit à ceux qui lui avaient conseillé de la faire représenter. Votre Pièce est excellente, lui répondirent-ils ; mais vous la donnez à une Troupe qui n’entend que le Comique ; faites-la jouer à l’Hôtel de Bourgogne ; vous verrez quel succès elle aura. Ce conseil fut suivi ; et la Pièce réussit très heureusement. Le parti que prit Racine de faire jouer sa Tragédie sur un autre Théâtre, fut cause que Mademoiselle du Parc*, la meilleure Actrice de la Troupe de Monsieur, la quitta pour passer dans celle de l’Hôtel de Bourgogne ; ce qui mortifia Molière, et fut, entre lui et Racine, la source d’un refroidissement qui dura toujours, quoiqu’ils se rendissent mutuellement justice sur leurs ouvrages.
Un bel esprit se trouvant à un Sermon auprès d’un Abbé, celui-ci faisait des contorsions épouvantables, et des grimaces de désespéré, en répétant sans cesse ces mots : « O Racine, Racine » ! après le Sermon, le bel esprit, curieux de savoir ce qui agitait si fort cet Ecclésiastique, prit la liberté de le lui demander avec l’air de l’intérêt. « Eh ! quoi, Monsieur, lui dit l’Abbé, vous ne savez pas ce qui arriva à Racine au sujet de sa Tragédie d’Alexandre ; il la donna d’abord à la Troupe de Molière ; et elle n’eut pas de succès ; mais l’ayant fait jouer ensuite à l’Hôtel de Bourgogne par d’excellents Acteurs, elle enleva tous les suffrages. Voilà, Monsieur, une partie de ce qui m’arrive à moi-même. C’est moi qui ai composé le Sermon que vous venez entendre ; c’est, au dire des connaisseurs, un discours parfait ; je l’ai donné à débiter à ce bourreau ; voyez quel effet cela produit dans sa bouche ! Mais je ferai comme Racine ; je lui ôterai mon Sermon ; et je le ferai prêcher par quelqu’un qui s’en acquittera mieux que lui ».
Amants Magnifiques. Il ne s’en déclara point l’Auteur ; mais il eut la prudence de le dire à Sa Majesté. Toute la Cour trouva ces vers très beaux, et, tous d’une voix, les donna à Benserade*, qui ne fit point de façon d’en recevoir les compliments, sans néanmoins se livrer avec trop d’imprudence. Le grand Seigneur qui le protégeait, était ravi de le voir triompher ; et il en tirait vanité, comme s’il avait lui-même été l’Auteur de ces vers. Mais quand Molière eut bien préparé sa vengeance, il déclara publiquement qu’il les avait faits ; ce qui piqua également et Benserade* et son Protecteur.
Festin de Pierre.Desfonandrés, qui signifie tueur d’hommes ; à M. Esprit, qui bredouillait, celui de Bahis, qui signifie jappant, aboyant. Macraton fut le nom qu’il donna à M. Guenaut, parce qu’il parlait lentement ; et enfin celui de Tomès, qui signifie un Saigneur, à M. d’AquinAquin, Antoine d’ (1620 – Vichy 1696) : Médecin de Marie-Thérèse d’Autriche, puis de Louis XIV lui-même, il fut disgracié en 1693. (Le petit robert des noms propres 2007).
La Critique de quelques Comédiens de Molière fait la matière du premier Acte, qui n’a presque aucun rapport avec le reste. Un Chevalier railleur dit à un Marquis, zélé partisan de Molière :
Hors Molière, pour vous il n’est point de salut.
Boileau n’était pas content de ces deux vers, quoiqu’en dépit de leur irrégularité grammaticale ils aient passé en proverbe :
Le véritable Amphitrion, Est l’Amphitrion où l’on dîne ;
Il fallait pour l’exactitude, chez lequel on dîne. Rotrou avait dit avant Molière, dans sa Comédie des Sosies :
Point, point d’Amphitrion, où l’on ne dine point.
Quant à l’ouvrage même, qui s’est si fort acquis la faveur du Public, Despréaux ne le goûtait que médiocrement. Il prétendait que le Prologue de Plaute* valait mieux que celui de Molière. Il ne pouvait souffrir les tendresses de Jupiter envers Alcmène, et surtout la Scène où ce Dieu ne cesse de jouer sur le terme d’Époux et d’Amant. Plaute* lui paraissait aussi plus ingénieux dans la Scène et dans le jeu du Moi. Il citait même un vers de Rotrou, qu’il prétendait plus naturel que ces deux-ci qui sont de Molière :
Et j’étais venu, je vous jure, Avant que je fusse arrivé.
Voici le vers de Rotrou :
J’étais chez nous longtemps avant que d’arriver.
Dacier, Anne Lefebvre, Mme(Preuilly-sur-Claise 1647 – Paris 1720) : érudite française, épouse d’André Dacier, elle traduisit les auteurs grecs et latins et fut à l’origine de la seconde querelle des Anciens et des Modernes. Traductrice de L’Iliade (1699) et de L’Odyssée (1708) d’Homère, elle s’opposa aux libres adaptations de Houdar de la Motte et prit vivement position pour les Anciens dans son traité des Causes de la corruption du goût (1714). (Le Petit Robert des noms propres 2007).Amphitrion de Plaute* était fort au-dessus du Moderne ; mais ayant ouï dire que Molière voulait faire une Comédie des Femmes Savantes, elle supprima sa dissertation.
Amphitrion de Plaute* avec celui de Molière, pour décider cette dispute, je crois que M. Perrault* gagnerait sa cause. »
Amphitrion de Molière. Ah ! Que cette Pièce me fit de plaisir ! Je le crois bien, lui dit une femme aussi vertueuse que spirituelle : cette Comédie est sans doute divertissante : c’est bien dommage qu’elle apprenne à pécher. »
Avant Molière, un Poète Italien, Coquille : Il Merito → Il Marito.Ludovico DolceDolce, Ludovico (Venise, 1508 – 1568) : auteur polygraphe, un grammairien et un théoricien de la peinture italienne.Amphitrion de Plaute* dans une Comédie intitulée Il MaritoDolce, Lodovico, 1545, Il Marito : comédie en 5 actes et en vers.Dryden, John Aldwinkle (Northamptonshire, 1631 – Londres, 1700) : auteur dramatique anglais. Poète-lauréat, adaptateur et librettiste (King Arthur avec Purcell). Dès 1663, il instaure la comédie gaie, développant de spirituels badinages entre galants et coquettes autour du contrat moral entre époux (le Mariage à la mode, 1671). Il remanie Molière dans Sir Martin Mar-all (1667), crée plusieurs tragédies à grand spectacle d’une emphatique grandeur dans le style héroïque : The Conquest of Granada (La Conquête de Grenade), Aureng-Zebe (1675). Vrai Boileau anglais dans son Essai sur la poésie dramatique, il étudie les genres, mètres et unités et ouvre la voie aux dramaturges contemporains, en particulier aux premières dramaturges à gagner leur vie par leur plume, Mrs. Behn et Mrs. Mary Aix. (DET, A-M Imbert, p. 532)Amphitrion de Molière. Madame de MontaigueMontagu, Lady Mary Wortley (26 mai 1689 – 21 août 1762) : écrivaine britannique.
Bourgeois-Gentilhomme, le rôle de NicoleNicole (Bourgeois gentilhomme) : servante.Je reçois votre Actrice.
Le Festin de Pierre, parce qu’il était en Prose, nuisit au succès de l’Avare. Molière, en homme qui connaissait le monde, donna le temps au Public de revenir, et ne rejoua l’Avare qu’environ un an après. Selon son attente, on vint alors voir avec empressement, ce qu’on avait méprisé peu de temps auparavant.
Cette Comédie a été traduite en plusieurs Langues, et jouée sur plus d’un Théâtre d’Italie et d’Angleterre. La Traduction surtout de M. FildingFielding, Henry Sharpham (Park, Somersetshire, 1705 – Lisbonne, 1754) : écrivain anglais, auteur d’une trentaine de comédies. Son Author’s Farce est une pochade sur la comédie contemporaine, comme Tom Thumb (Tom Pouce, 1730) et The Covent Garden Tragedy, des satires de la tragédie pompeuse, et Grub Street Opera, de la famille royale. Interdit, il se consacre à la comédie sérieuse, The modern Husband (l’Époux moderne), et adapte Molière puis, irréductible, passe à des satires du théâtre et de la corruption. Son thème favori, la répétition théâtrale, fait entendre la voix de l’auteur, comme dans son roman, Tom Jones. Innovateur ironique, il lança des genres hybrides : tragédie burlesque, opéra farce, préfigurant la « revue ». (DET, A-M Imbert, p. 657).
M. RiccoboniRiccoboni, Louis (Modène, 1674 ou 1677 – Paris, 5 décembre 1753) : acteur célèbre, auteur et critique dramatique. En 1716, le Régent donne à sa troupe de comédiens la salle de l’hôtel de Bourgogne : Riccoboni se fait appelait Lelio, et sa femme, Hélène Flaminia. En 1729, il est à la cour de Parme, puis revient à Paris en 1731, ne paraît plus sur scène, mais il écrit sur le théâtre, en italien et en français. (DLF XVIII p. 1119)Avare est tirée du Dottor Bachettone, ou Le Docteur Dévot ; mais après des recherches très exactes, il a été démontré que la Pièce Italienne est postérieure aux ouvrages de Molière. Avec une plus grande connaissance de notre ancien Théâtre, M. Riccoboni aurait vu que la Belle Plaideuse, mauvaise Comédie de Boisrobert, avait fourni à notre Poète le Canevas de ces Scènes, où un fils emprunte de l’argent d’un Usurier, et cet Usurier se trouve être son père ; où le père veut donner comme argent comptant des effets de nulle valeur. Il est étonnant que M. Riccoboni qui a cherché des ressemblances entre les Comédies Italiennes et celles de Molière, n’ait pas fait mention d’une Pièce de l’Arioste intitulée Gli SuppositiArioste, Ludovico Ariosto dit l’ (Reggio Emilia 1474 – Ferrare 1533) : poète dramatique italien. Il fait à Ferrare des études juridiques et humanistes tout en fréquentant les cercles cultivés gravitant autour de la maison d’Este. Il occupe diverses fonctions officielles dont la surintendance aux spectacles de la cour en 1525. L’éclat de Roland furieux (Orlando Furioso, 1516 et 1532) offusque le reste de son œuvre. Pour le théâtre, il écrit cinq comédies, dont une inachevée. Dans le prologue de la première, La Cassaria (1508, en prose ; 1529, en vers), il revendique la nouveauté absolue de sa pièce par rapport aux comédiens antiques. [...]. Il en va de même pour I Suppositi (1509, en prose ; 1532, en vers). Il Negromante (composé en 1510, achevée en 1520) s’inscrit entièrement dans la culture de la Renaissance par l’ironie contre « la vanité des superstitions de la magie ». La Lena (carnaval de 1528) fait vivre le monde authentique des faubourgs de Ferrare, où les valets comme les maîtres, tout comme l’entremetteuse Lena, dominent par la ruse et l’argent. La satire est vive, mais le style très maîtrisé en tempère l’âpreté. (DET, V. Tasca, p. 112).’Avare.
Avare, où Despréaux fut des plus assidus. « Je vous vis dernièrement, lui dit Racine, à la Pièce de Molière ; et vous riiez tout seul sur le Théâtre. Je vous estime trop, lui répondit son ami, pour croire que vous n’y ayez pas ri, du moins intérieurement ».
Frosine (L’Avare) : Femme d’intrigueAvareHarpagon (L’Avare) : Père de Cléante et d’Élise, et amoureux de Marianne.
Béjart, Louis dit L’Éguisé (1630 – 1678) : acteur. On ne peut déterminer la date où il entre dans la troupe de Molière ; en tout cas, il est du nombre des acteurs qui s’installent en 1658 dans la salle du Petit-Bourbon. Il boitait, et ne tint jamais, semble-t-il, que des rôles secondaires, sauf dans l’Avare où il représentait La Flèche. En mars 1670, il prit sa retraite avec une pension de 1000 livres, et mourut le 13 octobre 1678. (DLF XVII p. 129)FlêcheLa Flèche (L’Avare) : Valet de Cléante.Avare ; et Harpagon dit de ce Valet, par allusion : « Je ne me plais point à voir ce chien de boiteux-là »L’Avare, Acte I, scène 3.boiteux, toute autre injure qui vient dans la tête de l’Acteur.
Le Bourgeois gentilhomme] était copié d’après Rohaut*, quoiqu’ami de l’Auteur, qui fit emprunter son chapeau pour le donner à Du Croissy*.
Le Bourgeois gentilhomme], le Roi n’en dit pas un mot ; et tous les courtisans en parlèrent avec le dernier mépris. Le déchaînement était si grand, que Molière n’osait se montrer : il envoyait seulement Baron* à la découverte, qui lui rapportait toujours de mauvaises nouvelles. Au bout de cinq ou six jours, on joua cette Pièce pour la seconde fois. Après la représentation, le Roi, qui n’avait pas encore porté son jugement, dit à Molière : je ne vous ai point parlé de votre Pièce à la première représentation, parce que j’ai appréhendé d’être séduit, par la manière dont elle avait été représentée ; mais en vérité, Molière, vous n’avez encore rien fait qui m’ait mieux diverti, et votre Pièce est excellente. Aussitôt l’Auteur fut accablé de louanges par les Courtisans, qui répétaient, tant bien que mal, ce que le Roi venait de dire à l’avantage de cette Pièce.
Lucile (Le Bourgeois gentilhomme) : fille de M. Jourdain.Cléonte (Le Bourgeois gentilhomme) : amoureux de Lucile.Covielle (Le Bourgeois gentilhomme) : valet de Cléonte.
Lully* ayant traité d’une charge de Secrétaire du Roi du Grand-Collège, alla trouver la compagnie pour se faire recevoir : mais ces Messieurs lui répondirent unanimement, qu’ils ne voulaient point de farceur. Il eut beau leur dire qu’il n’avait jamais représenté sur le Théâtre que trois fois, dans le Bourgeois-Gentilhomme, et cela devant le Roi ; ils furent sourds. Il alla s’en plaindre à M. de Louvois, qui lui dit que les Secrétaires du Roi avaient raison. Quoi ! Monsieur, lui répondit Lully*, si le Roi vous ordonnait, tout Ministre que vous êtes, de danser devant lui, vous le refuseriez ? M. de Louvois ne sachant que lui répondre, lui expédia un ordre qui le fit recevoir.
Bourgeois-Gentilhomme. Il comprit tout le sujet de la Pièce, sur ce qu’on lui en expliqua ; et dit à la fin, qu’il aurait souhaité qu’il y eût dans le dénouement de certaines choses qu’il marqua. Il vit aussi l’Avare ; et ce qu’il y eut de surprenant, c’est qu’il dit, pendant la Pièce, qu’il gagerait que la cassette où était l’argent de l’Avare serait prise, et que l’Avare serait trompé.
Le Carnaval : Lorsque cette Mascarade a été représentée sur le Théâtre de l’Opéra, elle a toujours été précédée de quelque autre Divertissement, le plus souvent de l’Eglogue de Versailles, et quelquefois du Ballet de Villeneuve Saint-Georges. Ce Divertissement a paru, pour la première fois, en 1675, pour amuser le Public, après qu’on en eut régalé la Cour.
La Casaque : C’est une de ces petites Farces, que Molière donnait en Province, et qu’il faisait jouer ensuite à Paris après les grandes Pièces.
Les Femmes savantes], est l’endroit qui a fait le plus de bruit. Trissotin et Vadius y sont peints d’après Nature. Montpensier, Anne Marie Louise d’Orléans, duchesse de, dite la Grande Mademoiselle (Paris 1627 – id. 1693) : fille de Gaston d’Orléans et de Marie de Bourbon, duchesse de Montpensier. Elle prit part à la Fronde et fit tirer le canon de la Bastille sur les troupes royale pour défendre Condé, lors de la bataille du faubourg Saint-Antoine (1652). Elle était une des plus riches héritières d’Europe, fit plusieurs projets de mariage qui échouèrent tous et finit par épouser secrètement Lauzun (1681) dont elle se sépara bientôt. Elle a laissé des Mémoires. (Le Petit Robert des noms propres 2007).
Cocu Imaginaire. Il en marqua son ressentiment à un de ses amis : « Comment, lui dit-il, un Comédien aura l’audace de mettre impunément sur le Théâtre un homme comme moi ! »...
« De quoi vous plaignez-vous, répond son ami ? Il vous a peint du beau côté, en ne faisant de vous qu’un Cocu Imaginaire : vous seriez bien heureux d’en être quitte à si bon marché ».
Cette petite Comédie est tirée d’une Pièce Italienne, intitulée Il Cornuto per opinioneIl Ritratto ou Arlichino cornuto per opinione (Le portrait ou Arlequin cocu imaginaire) : canevas italien en prose et en trois actes. Comédie qui n’a pas été imprimé.
Un nommé NeufvillenaineSganarelle ou le Cocu Imaginaire figurant dans la pléiade, Neufvillaine est un homme de paille, un personnage fictif.
C’est la même que celle de Molière, avec un argument en prose à chaque Scène. Neufvillenaine, qui se nomme pas, la dédia à Molière, et lui manda qu’enchanté des beautés de cette Pièce, il s’était aperçu, après y avoir été cinq ou six fois, qu’il l’avoir retenue par cœur ; que, dans ce même temps, un de ses amis en Province l’ayant prié de lui donner des nouvelles de cette Comédie, il la lui avait envoyée ; mais quelque temps après, ayant vu qu’il s’en était répandu plusieurs copies très-difformes, tant des vers que de la prose, il avait pris le parti de la faire imprimer, et de la lui dédier.
Cette petite Pièce est une peinture naïve des ridicules de la Province. Bien des gens de goût se récrièrent contre elle ; mais le peuple pour qui Molière l’avait faite, la vie en foule et avec plaisir. Le rôle de la Comtesse était rempli par Hubert*, Acteur si excellent pour ces sortes de caractères de femmes, que les rôles de Mde. PernelleMadame Pernelle (Tartuffe) : mère d’Orgon.Madame Jourdain (Bourgeois gentilhomme) : femme de Monsieur Jourdain.Madame de Sotenville (George Dandin) : femme de Monsieur de Sotenville.
À la Scène seizième de cette Comédie [La Comtesse d’Escarbagnas], après que M. Thibaudier a lu des vers ; Le Vicomte dit, parlant à la Comtesse.
« Je trouve ces vers admirables, et ne les appelle pas seulement deux strophes, comme vous ; mais deux épigrammes aussi bonnes que toutes celles de Martial*. »
La Comtesse
« Quoi ! Martial, fait-il des vers ? Je pensais qu’il ne fit que des gants »
M.Thibaudier
« Ce n’est pas ce Martial-là, Madame ; c’est un Auteur qui vivait il y a trente ou quarante ans »
Ce Martial, qui ne faisait point de vers, était un Marchand Parfumeur, et joignait à cette qualité celle de Valet-de-chambre de Monsieur.
Denise de la Fontaine, Marquise de Villarceaux, fille d’honneur de la reine Anne d’Autriche, et fille d’Anne de la Fontaine, seigneur d’Esches et d’Orgerus. Elle fut mariée le 8 mai 1643 à Louis de Mornay (1619-1691), militaire et courtisan. (Moreri, 1759).Quem habuit successorem Belus Rex assyriorum ? Ninum
Mlle Molière* rentrait dans sa loge après avoir joué dans cette ComédieLe Concert ridicule de Palaprat. Comédie en un Acte et en prose dont la première représentation serait de 1689 et la première publication de 1694.
Il parait que la Princesse d’Élide de Molière a pu fournir le sujet de la Coquette FixéeVoisenon, 1746, La Coquette fixée : comédie en 3 actes et en vers, avec un divertissement, au théâtre italien.
On trouve dans cette ComédieChappuzeau, 1663, La Dame d’intrigue ou le riche vilain : comédie en 3 actes et en vers.l’Avare de Molière, qui demande à la Flèche à voir ses mains, et qui, après les avoir vues toutes deux, demande encore les autres. Voici comment ChapuzeauChappuzeau, Samuel (Paris, 1625 – Paris, 1701) : sa famille était protestante, originaire du Poitou et appartenant à la noblesse de robe. [...]. On le vit tour à tour secrétaire de la duchesse de Hesse-Cassel, correcteur d’imprimerie et professeur à Lyon (1651), précepteur de Guillaume d’Orange, citoyen de Genève, directeur de pension à Paris, pour finir gouverneur des pages à la cour du duc de Zell (1682). Chargé d’une nombreuse famille, avec peu de ressources, il eut une existence difficile. Il rédigea les récits du voyageur Tavenier. Son livre sur le théâtre est l’unique ouvrage qui, au XVIIe siècle, donne de nombreux renseignements sur le mode de vie des comédiens. Il traite : « I. De l’Usage de la comédie, II. Des auteurs qui soutiennent le théâtre, III. De la conduite des comédiens. » (DLF XVII p. 272).
Çà, montre moi la main.
Tenez,
L’autre.
Tenez, voyez jusqu’à demain.
L’autre
Allez la chercher ; en ai-je une douzaine ?
Une Comédie Italienne du SechiSecchi, Niccolò : Dramaturge italien du XVIe siècle.La Filia creduta MaschioSecchi, 1581, L’interesse (La Filia creduta Maschio) : comédie.
Nicomède.
Ce Compliment fut fort bien reçu, et la petite Comédie du Docteur Amoureux très applaudie. Molière faisait le Docteur, et la manière dont il s’acquitta de ce personnage, le mit dans une si grande estime, que le Roi donna ses ordres pour établir sa Troupe à Paris.
Le Docteur Amoureux fit renaître la mode de représenter de petites Pièces d’un Acte ou de trois, après celle de cinq. Usage qui était perdu depuis longtemps, et qui a toujours subsisté depuis.
Outre Le Docteur Amoureux, Molière avait fait plusieurs autres petites Farces pareilles, comme Les Trois Docteurs Rivaux, Le Maître d’école, etc. On a cru que, dans ces sortes de Pièces, chaque Acteur de la Troupe de Molière, en suivant un plan général, tirait le Dialogue de son propre fond, à la manière des Comédiens Italiens ; mais si l’on en juge par deux Pièces du même genre qui sont parvenues jusqu’à nous, elles étaient écrites et dialoguées en entier. Ces deux Pièces se trouvent dans le Cabinet de quelque curieux. Le grand Rousseau* les avait. C’est Le Médecin malgré lui ; et La Jalousie de Barbouillé qui est un Canevas, quoi qu’informe du troisième Acte de George Dandin.
Contemplateur. Il disait que la Nature semblait lui avoir révélé tous ses secrets, du moins pour ce qui regarde les mœurs, et les caractères des hommes. Il regrettait fort qu’on eût perdu la petite Comédie du Docteur Amoureux, parce qu’il y a toujours quelque chose de saillant et d’instructif dans ses moindres ouvrages. Selon lui, Molière pensait toujours juste, mais il n’écrivait pas toujours juste, parce qu’il suivait trop l’essor de son premier feu, et qu’il lui était impossible de revenir sur ses ouvrages.
Précieuse Ridicules, qui mirent Molière en réputation. La Pièce ayant eu, comme on sait, l’approbation de tout Paris, on la joua à la Cour qui était alors au voyage des Pyrénées, où elle fut très-bien reçue ; et cela anima le courage de l’Auteur.
Molière joua le rôle de Dom Garcie, et ce fut par cette Pièce qu’il apprit qu’il n’avait point de talent pour le sérieux, comme Auteur. La Pièce et le jeu de Molière furent très mal reçus. Cette Pièce, imitée de l’Espagnol, n’a jamais été rejouée depuis sa chute. La réputation naissante de Molière souffrit beaucoup de cette disgrâce, et ses ennemis triomphèrent quelque temps. Visé* s’en réjouit dans son Mercure GalantDonneau de Visé, Le Mercure galant : revue française fondée en 1672.Dom Garcie ne fut imprimé qu’après la mort de l’Auteur. Molière, comptant sans doute qu’il ne le serait jamais, en tira quelques traits qu’il jugea dignes d’être insérés dans d’autres Pièces. Tels sont des endroits de la cinquième scène de l’Acte second, et la Scène huitième du quatrième Acte du Misanthrope ; et quelques vers de l’Acte second, qui sont dans la sixième Scène de l’Amphitrion.
Don Quichotte, Comédie, jouée par la Troupe de Molière après le retour de Baron, qui avait quitté cette Troupe, pour se mettre dans celle de campagne de la Raisin. Molière, contre son ordinaire, joua assez mal le principal rôle ; et l’on remarqué que les Dom Quichotteet les Sanchon’ont jamais fait grande fortune au Théâtre.
L’idée principale de cette Comédie [L’École des femmes] est tirée d’un Livre intitulé : Les Nuits Facétieuses du Seigneur StraparoleStraparola, Giovanni Francesco (vers 1480 – 1557)Straparola, 1550–1553, Les Nuits facétieuses : ouvrage composé de 75 nouvelles.
L’École des Femmes éprouva dans sa naissance de grandes contradictions.Tarte à la crème. Mais Tarte à la crème, n’est point un défaut, répondit le Bel-esprit, pour la décrier comme vous faites. Tarte à la crème est exécrable, répliqua le Courtisan : Tarte à la crème, bon Dieu ! Avec du sens commun peut-on soutenir une Pièce où l’on ait mis Tarte à la crème ?Critique de l’École des Femmes. La Tarte à la crème n’y fut pas oubliée ; et quoique, ce mot étant devenu proverbe, la raillerie que Molière en fit dans la critique, fût partagée entre ceux qui l’avaient employé ; le Seigneur qui savait en être l’original, fut si vivement piqué d’être mis sur le Théâtre, qu’il s’avisa d’une vengeance aussi indigne d’un homme de sa qualité, qu’elle était imprudente. Tarte à la crème, Molière ; Tarte à la crème ; il lui frotta le visage contre ses boutons qui, étant fort durs et fort tranchants, le mirent en sang. Le Roi qui vit Molière le même jour ; apprit la chose avec indignation, et le marqua au Duc d’une manière assez vive.
L’École des femmes, Agnès : Jeune fille innocente élevée par Arnolphe.L’École des femmes, qu’elle rendait supérieurement.
Thomas Corneille* se faisait appeler M. de Lille, apparemment pour le distinguer de son frère. On croit que c’est de lui que Molière a voulu parler dans son École des femmes, lorsqu’il fait dire à Chrysalde :
Quel abus de quitter le vrai nom de ses pères, Pour en vouloir prendre un bâti sur des chimères ! De la plupart des gens c’est la démangeaison ; Et, sans vous embrasser dans la comparaison, Je sais un paysan, qu’on appelait Gros-Pierre, Qui, n’ayant pour tout bien qu’un seul quartier de terre, Y fit tout à l’entour faire un fossé bourbeux Et de Monsieur de L’Île en prit le nom pompeux. Acte I, scène 1, vers 175-182.
D’où vient, cher le Vayer , que l’homme le moins sage La Mothe Le Vayer, François de (Paris, 1588 – 1672) : philosophe. Il était fils d’un magistrat, auquel il succéda en 1625. Mais il abandonna bientôt sa charge pour se consacrer à l’étude. Esprit d’une curiosité universelle, il fut reçu à l’Académie en 1639, et comme il avait publié en 1640 un livre intitulé :De l’Instruction de M. le Dauphin, Richelieu le désigna, en mourant, pour être le précepteur de Louis XIV. Anne d’Autriche ne voulut toutefois lui confier d’abord que l’éducation de son second fils. Les progrès qu’il lui fit faire la décidèrent à le placer auprès du jeune roi, de 1652 à 1660. (DLF XVII, p. 689).Pense lui seul avoir la raison en partage, Et qu’il n’est point de fou qui, par belles raisons, Ne loge son voisin aux Petites-Maisons, etc.
Molière lui fit entendre qu’il avait eu dessein de traiter ce sujet-là ; mais qu’il demandait à être traité avec la dernière délicatesse : qu’il ne fallait point surtout faire comme Desmarets*, dans ses Visionnaires, qui a justement mis sur le Théâtre des fous des Petites-Maisons. Mais le dessein du Poète Comique était de prendre plusieurs fous de société qui tous auraient des manies pour lesquelles se faire le procès les uns aux autres, comme s’ils étaient moins fous pour avoir différentes folies. Molière avait peut-être en vue cette idée, quand, à la fin de la première Scène de L’École des femmes, il faisait dire d’Arnolphe par Chrysalde :
Ma foi, je le tiens fou de toutes les manières.
Arnolphe dit de son côté de Chrysalde :
Il est un peu blessé sur certaines matières.
Stances de Despréaux à Molière, sur la Comédie de L’École des femmes, que plusieurs gens frondaient.
En vain mille jaloux esprits, Molière, osent, avec mépris, Censurer ton plus bel ouvrage Sa charmante naïveté S’en va, pour jamais, d’âge en âge, Divertir la postérité Que tu ris agréablement ! Que tu badines savamment ! Celui qui sut vaincre Numance, Qui mit Carthage sous sa loi, Jadis, sous le nom de Térence*, Sut-il mieux badiner que toi ? Ta Muse, avec utilité, Dit plaisamment la vérité ; Chacun profite à ton école : Tout en est beau, tout en est bon ; Et ta plus burlesque parole Est souvent un docte Sermon. Laisse gronder tes envieux : Ils ont beau crier, en tous lieux, Qu’en vain tu charmes le vulgaire ; Que tes vers n’ont rien de plaisant. Si tu savais un peu moins plaire, Tu ne leur déplairais pas tant.
Cette petite Pièce [La Critique de l’École des femmes] est le premier ouvrage de ce genre qu’on connaisse au Théâtre ; c’est un Dialogue plutôt qu’une véritable Comédie. Molière y fait autant la satire de ses Censeurs, que l’apologie de L’École des femmes.
Visé* avance un fait, au sujet de la Critique de L’École des femmes, qu’il faut rapporter ici tout faux qu’il parait être. « Nous verrons dans peu, continua Clorante, une Pièce de Molière intitulée : La Critique de l’École des Femmes, où il dit toutes les fautes que l’on reprend dans sa Pièce, et les excuse en même temps ; elle n’est pas de lui, répartit StratonStraton : philosophe grec péripatéticien (Lampsaque ? - Athènes ? -268). On l’appela le Physicien, car au Lycée dont il fut le directeur de -288 à -268, il orienta les recherches et l’enseignement surtout vers les sciences de la nature. Contrairement à Aristote, il nia les causes premières et finales dans l’explication des phénomènes. (Le Petit Robert des noms propres 2007).
Cette Pièce [l’École des maris] est la première de cet Auteur, représentée sur le Théâtre du Palais Royal, et la première qu’il ait fait imprimer. Sa qualité de Chef de la Troupe de Monsieur, fut un devoir pour lui de la dédier à ce Prince.
[…] Un conteBoccace (1349-1253) Le Décaméron.
Cette ComédieVoisenon (1739) L’École du Monde : comédie en 1 acte et en vers libre.L’Ombre de MolièreL’Ombre de Molière : comédie en 1 acte et en prose.L’École du monde, sous le titre de Dialogues en vers. Duchesne a imprimé cette Pièce avec celles de M. l’Abbé de VoisenonVoisenon, Claude-Henri de Fusée de, Comte de Voisenon dit Abbé de Voisenon (1708 – 1775), abbé du Jard et homme de lettres. (Wikipédia).
Il y a dans cette Pièce une ScèneLarivey, 1579, Les Esprits : comédie en 5 actes et en prose.Retour ImprévuRegnard, Jean-François (1700) Le Retour imprévu : comédie en 1 acte et en prose.Avare. Voici le Monologue de la RiveyLarivey, Pierre de (Troyes, v.1540 – id. v.1619) : auteur dramatique et traducteur français. Fils d’un marchand florentin émigré, il fut chanoine de Saint-Étienne de Troyes. Outre ses traductions de Piccolomini et de l’Arétin (L’Humanité de Jésus-Christ, 1604), c’est surtout par ses imitations et transpositions du théâtre comique italien qu’il a joué un rôle non négligeable dans la littérature française. Écrite en prose, ces libres traductions conservent la franchise et l’alacrité des œuvres originales par l’ingéniosité de l’intrigue et la vivacité du style. Œuvres principales : La Veuve, Les Esprits, Le Morfondu (1579). (Le Petit Robert des noms propres 2007).
Jésus, qu’elle est légère ! Vierge Marie, qu’est-ce qu’on a mis dedans ? Hélas ! Je suis perdu, je suis détruit, je suis ruiné. Au voleur, au larron ! Prenez-le. Arrêtez tous ceux qui passent. Fermez-les portes, les huis, les fenêtres. Misérable que je suis ! Où cours-je ? À qui le dis-je ? Je ne sais où je suis, que je fais, ni où je vais. (Aux spectateurs) Hélas ! Mes amis, je recommande à vous tous ; secourez-moi, je vous prie ; je suis mort, je suis perdu. Enseignez-moi qui m’a dérobé mon âme, ma vie, mon cœur, et toute mon espérance ? Que n’ai-je un licol pour me pendre ? Car j’aime mieux mourir que de vivre ainsi. Hélas ! Elle est toute vide, vrai Dieu ! Qui est ce cruel qui tout-à-coup m’a ravi mes biens, mon honneur et ma vie ? Ah ! Chétif que je suis : que ce jour m’a été malencontreux ! A quoi veux-je plus vivre, puisque j’ai perdu mes écus que j’avais si soigneusement amassés, et que j’aimais et tenais plus chers que mes propres yeux ? Mes écus que j’avais épargnés, retirant le pain de ma bouche, n’osant manger mon saoul ; et qu’un autre jouit maintenant de mon mal et de mon dommage !
Acte III, scène 6. .
M. Fouquet* engagea Molière à composer cette Comédie pour la fameuse Fête qu’il donna, au Roi, et à la Reine MèreAnne d’Autriche (Valladolid 1601- Paris 1666) : Reine de France. Fille de Philippe III d’Espagne, elle épousa Louis XIII en 1615 et lui donna deux fils (Louis XIV et Philippe d’Orléans), après vingt-trois ans d’un mariage peu heureux. Compromise par l’amour du duc de Buckingham, elle prit part aux intrigues menées contre Richelieu et fut même accusée de trahison pour avoir correspondu secrètement avec son frère le roi d’Espagne. À la mort de Louis XIII, elle devint régente (1643-1661) et gouverna avec Mazarin avec qui elle contracta peut-être un mariage secret. Elle sut faire preuve de fermeté pendant la Fronde et se retira au Val-de-Grâce lorsque son fils prit le pouvoir. (Le Petit Robert des noms propres 2007).Fâcheux fut conçue, faite, apprise, et représentée en quinze jours.
À la première représentation de cette Pièce, dès que la toile fut levée, Molière parut sur le Théâtre en habit de Ville, et, s’adressant au Roi, avec le visage d’un homme surpris, fit des excuses en désordres, de ce qu’il se trouvait là seul, et manquait de temps et d’Acteurs pour donner à Sa Majesté le divertissement qu’Elle semblait attendre. En même temps, au milieu de vingt jets d’eau naturels, s’ouvrit une coquille, d’où sortit une Naïade qui s’avança au bord du Théâtre, et d’un air héroïque, prononça les vers que M. Pélisson* avait faits et qui servent de Prologue.
Fâcheux, Molière, étant pressé par le Roi, eut recours à Chapelle* pour lui faire la Scène qu’il eût empruntée de Chapelle*. Il est bien vrai que dans la Comédie des Fâcheux, Molière, étant pressé par le Roi, eut recours à Chapelle* pour lui faire la Scène de Caritidés, que Molière trouva si froide qu’il n’en conserva pas un seul mot, et donna de son chef cette belle Scène que nous admirons dans les Fâcheux. Et sur ce que Chapelle* tirait vanité du bruit qui courut dans le monde qu’il travaillait avec Molière, ce fameux Auteur lui fit dire par M. Despréaux qu’il ne favorisât pas ces bruits-là ; que autrement il l’obligerait à montrer sa misérable Scène de Caritidés, où il n’avait pas trouvé la moindre lueur de plaisanterie.Gare le Pot au noir : et fait venir, comme par machine, Juste-Lispe, afin de trouver une rime à Éclipse.
Cependant c’était ce même Chapelle* qui donnait le ton à tous les beaux-esprits, comme à tous les ivrognes du Marais ; on prenait son attache pour débiter dans le beau monde des vers prétendus anacréontiques, où régnaient, disait-on, le plus beau naturel et les plus heureuses négligences.
Fâcheux, dit à Molière, en voyant passer le Comte de Soyecourt, insupportable Chasseur : voilà un grand original que tu n’as pas encore copié. C’en fut assez : la Scène du Fâcheux Chasseur fut faite et apprise en moins de vingt-quatre heures ; et, comme Molière n’entendait rien au jargon de la chasse, il pria le Comte de Soyecourt lui-même, de lui indiquer les termes dont il devait se servir.
Cette FarceLe Fagoteux, selon les Anecdotes Dramatiques.Médecin malgré lui, que Molière n’appelait jamais autrement que le Fagoteux.
Corneille dit qu’en travaillant à cette Pièce, il ne fit que céder aux instances de quelques personnes qui avaient tout pouvoir sur lui. Mais un peu d’intérêt aida sa complaisance. On trouve une quittance de Mademoiselle Molière*, en ces termes : je soussigné confesse avoir reçu de Troupe, en deux payements, la somme de deux mille deux cents livres, tant pour moi que pour M. Corneille, de laquelle somme je suis créancière avec ladite Troupe, et dont elle est demeurée d’accord pour l’achat de la Pièce du Festin de Pierre, qui m’appartenait, et que j’ai fait mettre en vers par ledit Sieur Corneille.
Les Femmes savantes], causa à Molière le même chagrin qu’il avait éprouvé au sujet de son Bourgeois Gentilhomme. Car ce ne fut qu’à la seconde représentation, qui fut donnée à Saint Cloud, que Sa Majesté dit à Molière que sa Pièce était très-bonne, et qu’elle lui avait fait beaucoup de plaisir.
Femmes Savantes, l’Hôtel de Rambouillet*, qui était le rendez-vous de tous les beaux-esprits. Molière y eut un grand accès, et y était fort bien venu ; mais lui ayant été dit quelques railleries piquantes de la part de Cotin* et de Ménage*, il n’y mit plus le pied, et joua, comme nous l’avons dit, Cotin* sous le nom de Trissotin, et Ménage sous le nom de Vadius. Cotin* avait introduit Ménage* chez Madame de Rambouillet : Femmes Savantes où elle s’était trouvée, elle ne put s’empêcher de lui dire : Quoi ! Monsieur, vous-souffrirez que cet impertinent de Molière nous joue de la sorte ? Ménage* ne lui fit point d’autre réponse que celle-ci : Madame, j’ai vu la Pièce, elle est parfaitement belle ; on n’y peut rien trouver à redire, ni à critiquer.
L’Abbé Cotin*, irrité contre Despréaux qui l’avait raillé dans sa troisième satire, sur le petit nombre d’Auditeurs qu’il avait à ses Sermons, fit une mauvaise satire contre lui dans laquelle on lui reprochait, comme un grand crime, d’avoir imité HoraceHorace, Quintus Horatius Flaccus (Venouse -65 - -8) : poète latin. […] Il fut instruit par les meilleurs maîtres à Venouse, à Rome, puis à Athènes. Il s’y lia avec Brutus, le meurtrier de César, et combattit à ses côtés à Philippes (-42). Après la défaite, il revint à Rome où il vécut obscurément, composant des vers lyriques (épodes) où il déplorait les malheurs de sa patrie. En -39, Virgile*, qu’il connut sans doute dans les cercles épicuriens, le présenta à Mécène. En -33, il reçut de ce dernier une villa près de Tibur où il passa la plus grande partie son temps, refusant parfois de revenir à Rome. Auguste chercha en vain à se l’attacher comme secrétaire. (Le Petit Robert des noms propres 2007).Juvenal, Decimus Junius Juvenalis (Aquinum, Campanie, v. 55 – v. 140) : poète satirique latin Auteur de seize Satires dans lesquelles il poursuivit avec une violence passionnée les vices de son époque, opposant à la Rome de son temps, dissolue et cosmopolite, la Rome traditionnelle, forte et pure, telle que l’on exaltée Cicéron et Tite-Live. (Le Petit Robert des noms propres 2007).La Critique désintéressée sur les satyres du tempsCotin, abbé, 1690-1700, La Critique désintéressée sur les satyres du temps.Femmes savantes.
cf. 1742, Bolaeana, p. 34
Femmes savantes, que le Poète Comique avait faits ainsi :
Quand sur une personne on prétend s’ajuster C’est par les beaux côtés qu’il la faut imiter
Despréaux trouva du jargon dans ces deux vers, et les rétablit de cette façon :
Quand sur une personne on prétend se régler, C’est par ses beaux endroits qu’il lui faut ressembler ; Acte I, scène 1, v.73-74.
Femmes savantes, entre Trissotin et Vadius. La même Scène s’était passée entre Gilles Boileau, frère du satirique, et l’Abbé Cotin*. Molière était en peine de trouver un mauvais ouvrage pour exercer sa critique, et Despréaux lui apporta le propre Sonnet de l’Abbé Cotin* avec un Madrigal du même Auteur, dont Molière sut si bien faire son profit dans sa Scène incomparable.
Savez-vous en quoi Cotin* Diffère de Trissotin ? Cotin* a fini ses jours, Trissotin vivra toujours.
Madame de Rambouillet, Catherine de Vivonne, et sa fille Madame la duchesse de Montausier, Julie d’Angennes.Richelet, César Pierre (Cheminon v. 1626 – Paris 1698) : lexicographe français. Il est l’auteur d’un Dictionnaire français (1680), témoignage précieux sur la langue du XVIIe siècle, notamment sur la langue familière, et d’une Versification française (1671). (Le Petit robert des noms propres 2007).s’adresser et reprocher, ne l’a pas dissimulé. Femmes Savantes de Molière, sont Mesdames de…Angennes, Julie d’ (Paris 1607- id. 1671) : fille de la marquise de Rambouillet et épouse de Charles de Montausier, qui fit composer pour elle La Guirlande de Julie. (Le Petit Robert des noms propres 2007)
L’auteur de Bolaeana dit, au sujet de cette idée plaisante de Bayle, « je rapportai la chose à M. Despréaux, qui me dit, qu’à la vérité, il aurait fallu marcher un peu sur la cendre chaude ; mais qu’à la faveur des défilés de l’art Oratoire, il se serait échappé d’un pas si délicat. Il n’y a rien, disait-il, dont la Rhétorique ne vienne à bout. Un bon Orateur est un espèce de Charlatan, qui sait mettre à propos du baume sur les plaies. »
Cette Comédie a reçu sur le Théâtre plusieurs changements qu’il n’est pas inutile de savoir. Ce sujet fut apporté en France par les Comédies Italiens, qui l’avaient eux-même imité des Espagnols. Tirso de MolinaTirso de Molina, ou Feray Gabriel Téllez (Madrid, vers 1583 - Soria 1648) : auteur dramatique, surnommé le Shakespeare espagnol. [...]. Gabriel Téllez, dit Tirso de Molina, fait profession dans l’ordre de la Merci en 1601. Il exerce de hautes charges dans son ordre dont il est le chroniqueur (Historia de la orden de la Merced). Outre des ouvrage édifiants, une partie de son œuvre en prose est contenue dans Cigarrales de Toledo (Vergers de Tolède, 1621) et dans Deleitar aprovechando (S’amuser avec profit, 1635). Son œuvre dramatique est considérable […]. L’Abuseur de Séville et le Convive de pierre (El Burlador de Seville y Convidado de piedra, vers 1621-1622) conte les amours tumultueuse ou diaboliques de don Juan Tenorio. [...] La signification théologique ou morale est primordiale : El Burlador est essentiellement une pièce d’intention religieuse invitant le pécheur au repentir immédiat. El Condenado por desconfiado (le Damné par défiance, vers 1625 ; l’attribution à Tirso n’est plus guère contestée) [...]. Parmi les comedias inspirées par la Bible, on retiendra surtout La Venganza de Tamar (la Vengeance de Thamar), la trilogie de La Santa Juana (la Sainte Jeanne) et El Mayor Desengaño (la plus Grande Désillusion, sur saint Bruno). Les drames historiques comptent de grandes œuvres : La Prudencia en la mujer, Antona García, La Dama del Olivar. Tirso est aussi l’auteur des très divertissantes comédies de mœurs ou d’intrigue :[...].(DET, B. Sesé p. 1630-1631)El Comvidado de PiedraAnecdotes Dramatiques, 1775) → El Comvidado de Piedra.Festin de Pierre : ces paroles signifiant précisément le Convié en un Repas. C’est-à-dire, la Statue de Pierre Conviée en un Repas. Ce qui a fait faire ce changement de titre, c’est qu’en effet la Statue Conviée, représente un Commandeur nommé Don Pedro. Toutes les Troupes de Comédiens ont ajusté ce sujet à leur Théâtre. De VilliersVilliers, Claude Deschamps, dit de (1601 – Illiers, 1681) : acteur, en 1624 aux côtés de Montdory, à parti de 1634, et au moins jusqu’en 1639, au théâtre du Marais, enfin à l’hôtel de Bourgogne, de 1642 à 1670. C’est ce qui lui valut les sarcasmes de Molière dans l’Impromptu de Versailles. Ce qui n’empêcha pas ce dernier de se souvenir, en composant son Dom Juan, du Festin de Pierre de Villiers, joué à l’hôtel de Bourgogne en 1660. Deux autres comédies peuvent lui être sûrement attribuées : Les Ramoneurs (1662) et L’Apothicaire dévalisé (1666). Il fut marié deux fois à des comédiennes ; la seconde Mlle de Villiers, Marguerite Béguet, fut la créatrice du rôle de Chimène au Marais en 1637, avant de suivre, vers 1642, son mari à l’hôtel de Bourgogne. (DLF XVII p. 1258)Dorimond, Nicolas Drouin, dit (Paris, v. 1628 – v. 1664) : acteur et auteur, joua surtout en province et à l’étranger : Lyon, 1658 ; Savoie, 1659 ; Turin ; Dijon, 1660 ; rue des Quatre-Vents à Paris, 1660 ; Pays-Bas, 1662-1663. Sa compagnie, dite « troupe de Mademoiselle », comprenait dix personnes, dont sa femme, Marie Dumont et son frère Louis, dit Dorimond jeune. Dès 1659 la compagnie lui attribuait une part supplémentaire pour rémunérer son travail d’écrivain, car elle ne jouait que les pièces qu’il composait. (DLF XVII p. 395).Rosimond, Claude Roze ou Larose dit (? – Paris, 1686) : comédien, joua à Rouen, puis sans doute à Grenoble. En 1673, il entra à la troupe du Marais où il reprit le rôle de Molière dans Le Malade imaginaire. Il mourut dans les mêmes circonstances que son illustre prédécesseur, en sortant de scène juste après avoir joué le Malade imaginaire, et les siens connurent les mêmes difficultés pour son enterrement. (DLF XVII, p. 1113)
Pédant JouéCyrano de Bergerac, 1654, Le Pédant joué : comédie en 5 actes et en prose. Selon la notice de la pléiade, page 1471, tome II, les deux scènes insérées sont la scène de la galère (Acte II, scène 4) et la scène du rire de Zerbinette (Acte III, scène 2). Soeur, Comédie de RotrouRotrou, 1647, La Sœur : comédien en 5 actes et en vers. La scène citée dans cette anecdote est la scène I de l’acte I.
O fatale nouvelle et qui me désespère ! Mon oncle te l’a dit, et le tien de mon père ? Oui Que pour Eroxène il destine ma foi, Qu’il doit absolument m’imposer cette Loi ? Qu’il promet Aurélie aux vœux de Polidore ? Je vous l’ai déjà dit, et vous le dis encore. Et qu’exigeant de nous ce funeste devoir, Il nous veut obliger d’épouser dès ce soir ? Dès ce soir Et tu crois qu’il te parlait sans feinte ? Sans feinte Ah ! Si l’amour tu ressentais l’atteinte, Tu plaindrais moins ces mots qui te coûtent si cher, Et qu’avec tant de peine il te faut arracher. Et cet avare écho qui répond par ta bouche, Serait plus indulgent à l’amour qui me touche. Comme on m’a tout appris, je vous l’ai rapporté ; Je n’ai rien oublié, je n’ai rien ajouté Que désiriez-vous plus ? Etc.
Molière, en traitant le sujet bizarre du Festin de Pierre, y avait hasardé quelques traits un peu forts qu’il a retranchés, entre autres celui-ci : Don Juan, dans une Scène avec un pauvre qui lui demandait l’aumône, ayant appris de lui qu’il passait sa vie à prier Dieu
Cette Pièce est en partie une de ces petites Farces que Molière avait préparées en Province, sous titre de Gorgibus dans le SacMolière, 1661, Gorgibus dans le sac : farce non imprimée.Art Poétique :
Dans ce sac ridicule, où Scapin s’enveloppe, Je ne reconnais plus l’Auteur du Misanthrope.Boileau, 1674,Art poétique, III, p. 400.
En effet, les gens de goût se récrièrent contre cette Comédie ; mais le Peuple, à qui Molière avait eu intention de plaire, la vit, et la voit encore avec plaisir. Il était même aisé de répondre aux critiques, que Molière a bien su lui-même distinguer les bonnes Pièces d’avec ces espèces de Farces, qu’il était obligé de faire pour déférer au goût de la plus grande partie des Spectateurs, et soutenir son Théâtre.
Quand Boileau a reproché à Molière,
…......D’avoir à Térence* allié Tarabin :
Il avait principalement en vue, comme on sait, les Fourberies de Scapin, dont la moitié est prise du Phormion de Térence*, et la Scène du Sac empruntée des Farces de Tabarin. On sera peut-être curieux de voir ici l’extrait de deux de ces Farces que Molière connaissait sûrement.
Piphagne, Farce à cinq personnages, en Prose.
Piphagne est un vieillard qui veut épouser Isabelle. Il confie son projet à son Valet, Tarabin, et lui ordonne d’aller acheter des provisions pour le festin des noces. D’un autre côté, Francisquine enferme dans un sac son mari Lucas, pour le dérober à la vue des Sergents qui le cherchent. Elle enferme dans un autre le Valet de Rodomont, qui vient pour la séduire. Sur ces entrefaites, Tabarin arrive pour exécuter sa commission. Francisquine, pour se venger, et de son mari, et du valet de Rodomont, dit à Tabarin que ce sont deux cochons qui sont dans ces sacs, et les lui vend vingt écus. Tabarin prend un couteau de cuisine, délie les sacs, et est fort surpris d’en voir sortir deux hommes. On rit beaucoup de son étonnement : et tous les Acteurs finissent par se battre à coups de bâtons.
Francisquine, seconde Farce.
Lucas veut faire un voyage aux Indes ; mais il est inquiet comment faire garder la vertu de sa fille Isabelle. Il en confie la garde à Tabarin qui promet d’être toujours dessus. Lucas part. Isabelle charge Tabarin d’une commission pour le Capitaine Rodomont, son Amant. Tabarin promet à Rodomont de le faire entrer dans la maison de sa Maîtresse ; et il lui persuade, pour que les voisins ne s’en aperçoivent pas, de se mettre dans un sac. Le Capitaine y consent ; et tout de suite on le porte chez Isabelle. Dans le même temps, Lucas arrive des Indes. Il voit ce sac où est Rodomont ; il le prend pour un ballot de marchandises, et l’ouvre. Il est fort étonné d’en voir sortir Rodomont, qui lui fait croire qu’il ne s’y était caché, que pour ne pas épouser une vieille qui avait cinquante mille écus. Lucas, tenté par une si grosse somme, prend la place du Capitaine, et se met dans le sac. Alors Isabelle et Tabarin paraissent. Rodomont dit à sa Maîtresse qu’il a enfermé dans ce sac un voleur, qui en voulait à ses biens et à son honneur. Ils prennent tous un bâton, battent beaucoup Lucas, qui trouve enfin le moyen de se faire reconnaître ; et la Pièce finit.
George Dandin] est pris d’un Conte de Bocace*.
Ce titreMolière, 1663, Gogibus dans le sac (selon les Anecdotes Dramatiques).Géronte (Les Fourberies de Scapin) : père de Léandre, et de Hyacinte.
Ne serait-ce point ici le modèleMolière, 1664, Le Grand benet de fils : modèle du Malade imaginaire (selon les Anecdotes Dramatiques).Diaforius, Thomas (Malade imaginaire) : Fils de M. Diaforius et amant d’Angélique.Malade Imaginaire ?
Cette Pièce[ ? ? ?] était une réponse à la critique que Molière avait faite des Comédiens de l’Hôtel de Bourgogne*, dans son Impromptu de Versailles. Beauchâteau et de Villiers y jouaient des rôles sous leurs noms propres.
Cette Pièce [L’impromptu de Versailles] est une conversation satyrique dans laquelle Molière se donne carrière contre les comédiens de l’Hôtel de Bourgogne*, et Boursault*, qui avait fait contre lui la Comédie du Portrait du Peintre. Boursault* n’est pas épargné ; il est nommé avec le dernier mépris ; mais ce mépris ne tombe que sur l’esprit et sur les talents ; il avait attaqué Molière par un endroit plus sensible. Ce qui regarde les Comédiens de l’Hôtel de Bourgogne*, peut avoir été dicté par l’esprit de vengeance ; mais du moins le bon goût l’a-t-il réglé, et l’utilité publique en pouvait être l’objet, puisque dans l’imitation chargée du jeu de ces Acteurs, on découvrait le ton faux et outré de leur déclamation chantante.
On trouve, dans cette Farce, un Canevas informe du troisième Acte de George Dandin. Le grand Rousseau* avait cette Pièce manuscrite. Voici ce qu’il en dit, dans une lettre à BrossetteBrossette, Claude (Taizé, 1671 – Lyon, 1743) : avocat au parlement de Lyon, érudit et fondateur de l’académie de Lyon. Il était lié avec Boileau, composa un commentaire de son œuvre (Genève, 1716) ainsi que de celle de Math(urin Régnier. On a perdu le manuscrit qu’il consacra à Molière. [...] (DLF XVIII p232.)
« Vous me demandez une analyse de la Farce du Barbouillé, cela sera bientôt fait. Le Barbouillé commence par se plaindre des chagrins que lui donne sa méchante femme. Il va consulter le Docteur sur les moyens de la mettre à la raison. Celui-ci parlant toujours, ne lui donne pas le temps de s’expliquer. La femme arrive, et le Docteur, continuant toujours ses tirades, les impatiente l’un et l’autre, au point de lui dire des injures. Entre autres choses, la femme lui dit qu’il est un âne, et qu’elle est aussi Docteur que lui : et le Docteur répond : Toi docteur ? Vraiment je crois que tu es un plaisant Docteur. Des genres, tu n’aimes que le masculin : à l’égard des conjugaisons, de la syntaxe, et de la quantité, tu n’aimes que, etc. Ils s’en vont, hormis la femme qui demeure pour attendre son galant avec qui elle est surprise par le mari qui amène avec lui son beau-père Villebrequin. Elle donne des coups de bâton au Barbouillé, feignant de les donner au galant : son père et elle se tournent contre le mari, qui continue ses invectives. Le docteur met la tête à la fenêtre, et leur fait à tous des réprimandes : il descend pour mettre la paix entre eux : ils se sauvent tous pour se dérober à la volubilité de sa langue ; et le Barbouillé, plus impatienté que les autres, pendant qu’il poursuit ses déclamations, lui attache une corde au pied, et l’ayant fait tomber, le traîne à écorche cul jusques dans la coulisse, avec quoi finit la Comédie. Tout cela est revêtu du style le plus bas et le plus ignoble que vous puissiez imaginer. Il est aisé de voir que ces sortes de Farces n’ont jamais été écrites par Molière ; mais par quelque grossier Comédien de campagne, qui en avait rempli les Canevas à sa manière. On sait assez que ces Farces n’étaient que des Improvisades à la façon des Italiens qui ne pouvaient divertir que par le jeu du théâtre ».
Malade Imaginaire pour la troisième fois, il se sentit plus incommodé qu’à l’ordinaire, du mal de poitrine auquel il était sujet. Il exigea, ce jour-là, de ses camarades, qu’on commençât la représentation à quatre heures précises. Sa femme et Baron* le pressèrent de prendre du repos, et de ne pas jouer. « Hé ! Que feraient, répondit-il, tant de pauvres ouvriers ? Je me reprocherais d’avoir négligé, un seul jour, de leur donner du pain ». Les efforts qu’il fit pour achever son rôle, augmentèrent son mal ; et l’on s’aperçut qu’en prononçant le mot juro, dans le Divertissement du troisième Acte, il lui prit une convulsion. On le porta chez lui dans sa maison, rue de Richelieu, où il fut suffoqué d’un vomissement de sang, le 17 février 1673.
Plût-à Dieu, Monsieur, dit durement le Prince en la recevant, que Molière me présentât la vôtre !
Malade Imaginaire, il cherchait un nom pour un Levrier de la Faculté, qu’il voulait mettre sur le Théâtre. Il trouva un garçon Apothicaire, armé d’une seringue, à qui il demanda quel but il voulait coucher en joue. Celui-ci lui apprit qu’il allait seringuer de la beauté à une Comédienne : « Comment vous nommez-vous, reprit Molière » ? Le Postillon d’Hippocrate lui répondit qu’il s’appelait Fleurant. Molière l’embrassa, en lui disant : Je cherchais un nom pour un personnage tel que vous. Que vous me soulagez, en m’apprenant le vôtre ! Le ClistériseurMalade Imaginaire, s’appelle Fleurant. Comme on sut l’histoire, tous les Petits-Maitres à l’envie allèrent voir l’original du Fleurant de la Comédie. Il fit force connaissances ; la célébrité que Molière lui donna, et la science qu’il possédait, lui firent faire une fortune rapide dès qu’il devint Maître Apothicaire.
Thomas DiaforiusDiaforius, Thomas (Malade imaginaire) : Fils de M. Diaforius et amant d’Angélique.Malade Imaginaire, qu’il jouait supérieurement. ToinetteToinette (Malade imaginaire) : servante.
Malade Imaginaire, les Mousquetaires, les Gardes-du-corps, les Gendarmes et les Chevaux-légers entraient à la Comédie sans payer ; et le Parterre en était toujours rempli. Molière obtint de Sa Majesté un ordre, pour qu’aucune personne de la Maison du Roi n’eut ses entrées gratisFuretière, 1690).gratis à la Comédie.
Mariage Forcé. Ce Seigneur, pendant son séjour à la Cour d’Angleterre, avait aimé Mlle Hamilton. Leur amours mêmes avaient fait du bruit ; il repassait en France sans avoir conclu avec elle ; les deux Frères de la Demoiselle le joignirent à Douvres, dans le dessein de faire avec lui le coup de pistolet. Du plus loin qu’il l’aperçurent, ils lui crièrent : « Comte de Grammont, Comte de Grammont, n’avez-vous rien oublié à Londres ? Pardonnez-moi, répondit le Comte, qui devinait leur intention ; j’ai oublié d’épouser votre sœur ; et j’y retourne avec vous, pour finir cette affaire. »
Cette Pièce [Le Mariage Forcé] fut représentée la première fois au Louvre accompagnée d’un Ballet du même titre, où Louis XIV dansa. Elle fut mise en vers par un anonyme, en 1674.
L’Auteur composa cette Farce de plusieurs Fragments des petites Pièces qu’il avait faites et jouées Province, entre autres, du Médecin volant, et du Fagoteux. Le fond du sujet en est tiré d’un ancien Conte ou Fabliau, intitulé : Le Vilain MireLe Vilain Mire, fabliau anonyme datant du XIIIe siècle.
Qu’ils sont doux ! Bouteille, ma mie.
Qudum Dulces Amphora amoena ! Qudum Dulces ! Sunt tuae voces ! Dum fundis merum in calices ; Utinam semper esses plena ! Ah ! Ah ! Cora mea lagena, Vacua cur jaces ?
Richelet, 1680).Médecin malgré lui.
Molière n’avait composé que les deux premiers actes de cette Pastorale ; elle fut représentée en cet état à Saint-germain. Guérin*, fils du Comédien de ce nom, acheva cette Pièce en 1699, y joignit des intermèdes, et changea la versification des deux premiers actes, qu’il mit en vers libres et irréguliers. La comparaison n’est pas à son avantage. Il a substitué un bouquet de fleurs au présent du moineau que Mirtil donnait à sa Maîtresse.
C’est la Pastorale de Molière, dont Guérin*, fils du comédien, mit les deux actes en vers lyriques, y en ajouta un troisième et des Intermèdes. Les Comédiens refusèrent cette PastoraleGuérin, 1699, Mirtil et Mélicerte : pastorale héroïque.Monseigneur, un ordre de faire jouer la Pièce.
Le Père GeoffroyGeoffroy, Jean-Baptiste (Charolles, 1706 – Semur, 1782) : jésuite. Professeur de lettres à Rouen, Caen, La Flèche et, vingt-deux ans durant, à Paris, membre des académies de Caen et de Lyon. Il composa plusieurs pièces, tragédies (Justin, Catilina, Basilide), comédie (Le Misanthrope), ballets, pour les collèges nombre de discours en latin. Ses Sermons (et oraisons funèbres) parurent à Lyon, en 1788, 4 vol. (DLF XVIIIe, p. 534).
Misanthrope à la lecture, et ne l’avaient reçu que par considération. Ce Chef-d’œuvre étant tombé, Molière le retira. Il le remit au Théâtre un moins après, et le fit précéder du Fagotier ou Médecin malgré lui. Le Fagotier comme il l’avait prévu, eut un si grand succès, qu’on le donna trois mois de suite, mais toujours suivi du Misanthrope.
Le Misanthrope] qui ait jamais été faite.
De ces colifichets dont le bon-sens murmure.
Le Public confus d’avoir pris le change, s’indisposa contre la Pièce.
Misanthrope.
Tartuffe, dont il avait paru trois Actes dès 1664, firent courir dans Paris plusieurs libelles très satyriques contre Molière.Misanthrope :
Et, non contents encore du tort que l’on me fait, Il court, parmi le monde, un livre abominable, Et de qui la lecture est même condamnable Un Livre à mériter la dernière rigueur, etc.
Misanthrope, lui avait dit : « Vous verrez bien autre chose ». Ce seul mot nous fait regretter que Molière n’ait pas fourni une plus longue carrière.
Misanthrope.
Misanthrope, il était brouillé avec Racine.
Acte I, scène 2.Misanthrope, dont Molière oppose le naturel au précieux du Sonnet d’OronteOronte (Le Misanthrope) : amant de Célimène.
Si le Roi m’avait donné Paris sa grand’Ville, etc. Acte I, scène 2, v. 393-394. Note 35 « Cette chanson ne figure dans aucun des recueils parus avant 1670. Elle sera largement diffusée, en revanche, dès la fin du siècle, par la parodie. On considère que l’air sur lequel elle était chantée est celui qu’on connaît par sa variante La Bonne Aventure, au gué. » (p. 1459 de la pléiade)
Baron* prenant ces tons de douleur et de sentiment qu’il avait si fort à sa disposition, ses yeux se remplissaient de pleurs ; les sanglots lui coupaient la voix ; on sentait de la difficulté à se refuser à l’espèce nouvelle de cette fiction intéressante.
Le Misanthrope. Il lui en rapporta le sujet, et même quelques endroits particuliers, qui lui avaient paru remarquables ; entre autres, le caractère d’un homme de Cour fainéant, qui s’amuse à cracher dans un puits pour faire des ronds. Molière l’écouta avec beaucoup d’attention ; et, quinze jours après, Angélo fut surpris de voir dans l’affiche de la Troupe de Molière, la Comédie du Misanthrope annoncée et promise ; et trois semaines, ou tout au plus tard un mois après, on représenta cette Pièce.
Brécourt* a été un bon Comédien dans le Tragique et dans le comique. Après avoir joué AntiochusAntiochus (Racine, 1670, Bérénice) : roi de Comagène.BéréniceRacine, 1670, Bérénice : tragédie en 5 actes et en vers.Colin (Brécourt, 1666, La Noce de village) : le marié.La Noce de VillageBrécourt, sieur Guillaume Marcoureau dit, 1666, La Noce de village.Alain (L’École des femmes) : paysan et servant d’Arnolphe.L’École des femmes, fit dire à Louis XIV, charmé de son jeu : Cet homme-là ferait rire une pierre.
Cette PastoraleMolière, 1666, Pastorale Comique : comédie en 1 acte et en vers, troisième entrée du Ballet des Muses.Ballet des Muses, donné à Saint Germain devant Louis XIV, par Benserade*, et dont elle formait la troisième entrée. Le peu de succès de cette Pièce, ainsi que de celle de Mélicerte, ne fit pas jouer un rôle bien brillant à Molière dans cette Fête.
Monsieur de Pourceaugnac], il répondait qu’il était Comédien aussi bien qu’Auteur, et qu’il fallait qu’il consultât l’intérêt de ses Acteurs aussi bien que sa propre gloire.
La Troupe de Molière fit doubler, pour la première fois, à la seconde représentation de cette Pièce[Les Précieuses ridicules], le prix ordinaire des places, qui n’était alors que de dix sols au Parterre.
Précieuses ridicules : La Pièce fut jouée avec un applaudissement général. Au sortir de la Comédie, Ménage* prenant Chapelain* par la main : « Monsieur, lui dit-il, nous approuvions, vous et moi, toutes les sottises qui viennent d’être critiquées si finement et avec tant de bon-sens ; mais croyez-moi, pour me servir de ce que Saint Rémi dit à Clovis : il nous faudra brûler ce que nous avons adoré, et adoré ce que nous avons brûlé. »
Précieuses Ridicules, un vieillard s’écria du milieu du Parterre : « Courage, Molière ; voilà la bonne Comédie. »
Depuis 1673, année dans laquelle la France perdit Molière, on ne vit pas, dit M. de Voltaire dans ses Questions sur l’encyclopédie, une seule Pièce supportable, jusqu’au Joueur du Trésorier de France Renard ; et il faut avouer qu’il n’y a eu que lui seul, après Molière, qui ait fait de bonnes Comédies en vers. La seule Pièce de caractère qu’on ait eu depuis lui, a été le Glorieux de DestouchesDestouches, pseudonyme de Philippe Néricault (Tours 1680 – Villiers-en-Bière 1754) : auteur dramatique français. Fils d’organiste, il alterne une carrière d’acteur peu marquante et des activités aux limites de la diplomatie et de l’espionnage, plus rentables. Ses premières comédies sont des imitations de Molière, dans le petit monnayage des études de caractère (L’Ingrat, l’Irrésolu, le Médisant), avec un grand succès en 1732, le Glorieux, toujours à la Comédie-Française. Il a dès lors commencé à produire des pièces plus originale, qui inaugurent le genre de la comédie larmoyante, avec en particulier le Philosophe marié (1727). [...]. (DET, M. de Rougemont p. 489)Glorieux, qui est le sujet de la Pièce. Rien n’étant si difficile que de faire rire les honnêtes gens, on se réduisit à donner des Comédies romanesques, qui étaient moins la peinture fidèle des Ridicules, que des essais de Tragédie bourgeoise. Ce fut une espèce bâtarde, qui, n’étant ni comique, ni tragique, manifestait l’impuissance de faire des Tragédies et des Comédies. Cette espèce cependant avait un mérite, celui d’intéresser ; et dès qu’on intéresse, on est sûr du succès. Quelques Auteurs joignirent aux talents que ce genre exige, celui de semer leurs Pièces de vers heureux. Voici comme ce genre s’introduisit.
Cette Pièce faisait partie des Fêtes superbes que Louis XIV, dans son nouveau Palais de Versailles, donna à la Reine sa mère, et à Marie-Thérèse, son épouse, sous le titre des Plaisirs de l’Isle enchantée. Ces fêtes offrirent, pendant sept jours, tout ce que la magnificence et le bon goût du Prince, le génie et les talents de ceux qui le servaient, pouvaient enfanter de plus merveilleux et de plus varié. L’Italien VigaraniVigarani, Carlos (Reggio nell’Emilia 1623 – Paris 1713) : architecte et ingénieur italien, fils aîné de Vigarani Gaspare, restera et verra sa carrière française assurée après le passage et le départ de France en octobre 1665 du Cavalier Bernin. Il construit des théâtres provisioires à la cour (Saint-Germain, 1666, 1670, Versailles, 1668), collabore avec Molière (La Princesse d’Élide, 1664, George Dandin, 1668) et surtout avec Lully jusqu’en 1680 (les Fêtes de l’Amour et de Bacchus à Versailles, 1668, puis de l’Académie royale de musique Cadmus et Hermione, 1673, Alceste, 1674, Athys, 1676, Isis, 1677) assurant lui-même aussi des mises en scène (Iphigénie de Racine, le Malade imaginaire de Molière en 1674). (DET, M. Freydefont p. 1708) Périgny, Octave, président de (1625 – 1670) : précepteur du dauphin, fils de Louis XIV, de 1667 à 1670, et poète qui travailla pour les fêtes de la cour en 1664 notamment et collabora aux Mémoires du roi, adressé à son fils. Sa femme composa une parodie d’une scène de l’opéra de Thésée. (DLF XVII, p. 983).Princesse d’Élide, et ceux de la sixième par un essai des trois premiers actes de Tartuffe ; tout cela rendit cette Fête une des plus éclatantes de l’Europe. Louis XIV n’avait donné à Molière que très peu de temps pour le spectacle qu’il lui demandait ; aussi ce Poète eut-il recours aux ouvrages d’un autre, pour y puiser une idée ; et c’est d’Augustin Moreto, Auteur Espagnol, qu’il emprunta la fable de La Princesse d’Elide. Ce fut même, de sa part, une galanterie assez fine, de présenter à deux Reines, Espagnoles de naissance, l’imitation d’un des meilleurs ouvrages de Théâtre de leur Nation. Il fut si pressé, qu’il ne pût mettre en vers que le premier Acte et la moitié de la première Scène du second. Cette Comédie, ainsi que Psyché, fut traduite en Italien par Riccoboni, qui les fit jouer dans son pays avant de venir en France.
Molière ne put faire que le premier Acte, la première scène du Second, la Premier du troisième, et les vers qui se récitent dans le Prologue. Le temps pressait : Pierre Corneille se chargea du reste de la Pièce : il voulut bien s’assujettir au plan d’un autre, et ce génie mâle, que l’âge rendait sec et sévère, s’amollit pour plaire à Louis XIV. L’Auteur de Cinna fit, à soixante-cinq ans, cette déclaration de Psyché à l’Amour, qui passe encore pour un des morceaux les plus tendres et les plus naturels qui soient au Théâtre. Toutes les paroles qui se chantent sont de Quinault*. Lully* composa les airs et les paroles de la Plainte Italienne. Voyez Pirame de la Serre.
Baron, fils du fameux Baron*, Comédien, l’était lui-même, et assez médiocre. Il avait ce que les Comédiens appellent l’emploi des grands Amoureux, tragique et comique. Il était froid ; cependant il eut une fois, en sa vie, de la chaleur dans un rôle. On avait remis Psyché. Mademoiselle DesmaresDesmares, Christine Antoinette Charlotte dite la (1682 – 12 septembre 1753) : comédienne française. Elle débuta sa carrière à la comédie-français à l’âge de 16 ans. Elle se retira de la troupe en 1721. Elle fut la maîtresse de Philippe, duc d’Orléans. Elle meurt le 12 septembre 1753. (César.org et Wikipédia).Orléans, Philippe, duc d’ (Saint-Cloud 1674 – Versailles 1723) : régent de France. (Le Petit Robert des noms propres 2007).
La superbe Salle des Machines, construite par les sieurs RatabonRatabon, Antoine (1617 – 12 mars 1670) : conseiller du roi, il fut le surintendant général des bâtiments de Louis XIV. (Wikipédia).Vigarani (Reggio nell’Emilia 1588 – Modène 1663) : architecte et ingénieur italien. En 1659, Mazarin appelle à Paris Gaspare, le préférant à Torelli pour lui confier l’aménagement d’une nouvelle salle de spectacle dans le palais des Tuileries, jugeant l’expérience architecturale de Viragani plus à la hauteur de cette mission. C’est le début de l’ère des Vigarani en France. Venu en 1659, Gaspare repartira en 1662 pour Modène. (DET, M. Freydefont p. 1708).Psyché, et fut abandonnée jusqu’en 1716. On en fit usage alors pour les Ballets, dont on amusa la jeunesse de Louis XV. C’est la même qui servit à recueillir l’Opéra après son incendie, et dans laquelle nous voyons aujourd’hui les Comédiens de la Nation.
M. de la MotteLa Motte, Antoine Houdar de (Paris, 1672 – 1731) : auteur dramatique. Fils de chapelier, il étudie d’abord le droit, mais une vocation irrésistible l’entraîne vers l’art dramatique. À vingt ans, il donne au Théâtre-Italiens sa première pièce, Les Originaux, farce en prose mêlée de vers, qui échoue. Il entre à Trappe, mais s’en prend point l’habit, en sort au bout de deux mois et reparaît au théâtre avec son charmant opéra, L’Europe galante. Encouragé par ce premier succès, il donne coup sur coup de nombreuses œuvres lyriques où il introduit trois innovations : le ballet proprement dit, la pastorale et la comédie-ballet. Il eut aussi quelque bonheur au Théâtre-Français avec six comédies et quatre tragédies, notamment Inès de Castro. Il était entré à l’Académie française le 8 février 1710 malgré les manœuvres déloyales de son adversaire Jean-Baptiste Rousseau ; mais il n’avait connu la véritable notoriété que par une mauvaise traduction de l’Iliade en vers français qu’il fit précéder d’un discours où il s’attachait à faire le procès des Anciens, s’attirant ainsi la colère de MmeDacier. Celle-ci l’ayant vivement attaqué dans son Traité des causes de la corruption du goût, il lui répondit par les Réflexions sur la critique, […]. Grand rumeur d’idées, La Motte fut l’hôte des café philosophiques et l’un des habitués de ceux de la Veuve Laurent, de Graudot, et du Café Procope. Devenu aveugle à quarante-trois ans, il prit son infirmité avec une résignation magnifique […]. (DLF XVIII, p. 682).Psyché par la Fontaine, est un sujet propre à produire un Spectacle magnifique, où la Terre, les Cieux et les Enfers peuvent offrir ce qu’ils ont de plus varié, et que ce sujet eût pu seul lui faire inventer l’Opéra.
Cette Pièce, très ancienne en Italie, est tirée d’une Comédie Espagnole, intitulée Desdein con le Desdein, d’Augustin MoretoMoreto y Cabaña, Augustin (Madrid 1618 – Tolède 1669) : poète et auteur dramatique précoce et abondant, Moreto connaît dans ses dernières années un grand succès à la cour d’Espagne. Auteur estimé de pièces religieuses et d’intermèdes comiques, il brille surtout par ses comédies profanes, au sujet souvent peu original mais où la grâce des dialogues, la finesse des notations psychologiques, la musicalité et le raffinement du cadre annoncent déjà Marivaux. Son chef-d’œuvre, le Dédain par le dédain (El Desdén con el desdén, 1652, [canegvas italien en 5 actes]), a été imité, adapté ou traduit par Molière (La Princesse d’Élide), Carlos Gozzi et bien d’autres. (DET, F. Serralta p. 1140).Princesse d’Elide ; et plusieurs Poètes modernes ont plus d’une fois employé cette situation. M. de Marivaux surtout, en a très bien profité dans l’Heureux Stratagème.
Molière, bien moins satisfait que personne, des deux ouvrages qu’il avait joints au Ballet des Muses, donné par Benserade* à Saint-Germain-en-Laye en présence de Sa Majesté, travailla à réparer son honneur dans la reprise qu’on devait faire de ce même Ballet, en composant la Comédie du Sicilien, pour la mettre à la place de la Pastorale Comique et de Mélicerte. Le succès de la nouvelle Pièce vengea notre Poète des airs avantageux qu’avait pris Benserade* avec lui depuis la Pastorale Comique. Voyez les Amants Magnifiques. Voyez la Pastorale Comique.
C’est dans la troisième Scène du Sicilien, plaisamment imaginée pour procurer à Adraste le moment de prendre ses mesures avec Isidore, que l’on trouve cette phrase passée en proverbe, assassiner, c’est le plus sûr. M. de Voltaire, dans ses Questions sur l’Encyclopédie, prétend que « Molière a risqué, en plaisantant, cette maxime ; mais que M. Rousseau de Genève dit très sérieusement la même chose, et qu’il veut que son Gentilhomme Menuisier, quand il a reçu un démenti ou un soufflet, au lieu de les rendre ou de se battre, assassine prudemment son homme. » L’impression de ces derniers mots en lettre italique, pourrait faire penser qu’ils se trouvent dans l’Emile de M. Rousseau ; c’est une infidélité de la part de l’Auteur des Questions sur l’Encyclopédie ; le mot d’assassinat, si révoltant, n’est point prononcé ; M. Rousseau se contente de dire « qu’il ne veut pas qu’Émile se batte ; que ce serait une extravagance ; mais qu’il se doit justice ; et qu’il en est le seul dispensateur. »
Cette Comédie n’est qu’une traduction libre de la Serva amorosoGoldoni, Carlo, 1752, La Serva amorosa (La Servante amoureuse) : comédie, en trois actes et en prose.Goldoni, Carlo (Venise 1707 – Paris 1793) : auteur dramatique italien, dont le nom est attaché pour le public à quelques titres rendus prestigieux par les représentations qui en ont été données au XXe siècle, et pour les historiens du théâtre à la « réforme » de la commedia dell’arte. Il a portant écrit une quinzaine de tragi-comédies, de nombreux livrets d’intermèdes comiques ou d’opéras et plus de cents comédies. (DET p. 736 V. Tasca).Malade Imaginaire de Molière, la plus grande partie du sujet de sa Pièce, et notamment le caractère de la Belle-mère, et tout le dénouement.
Voici une Comédie qui a fait beaucoup de bruit, et a été longtemps persécutée. Les gens qu’elle joue, ont bien fait voir qu’ils étaient plus puissants en France, que tous ceux que Molière avait joués jusqu’alors. Les Marquis, les Précieuses, les Médecins ont souffert doucement qu’on les représentât ; et ils ont feint de se divertir avec tout le monde, des peintures qu’on faisait au Théâtre ; mais les hypocrites n’ont point entendu raillerie ; ils se sont effarouchés d’abord, et ont trouvé étrange que Molière eût la hardiesse de jouer leurs grimaces, et de vouloir décrire un métier, dont tant d’honnêtes gens se mêlent. C’est un crime qu’ils ne purent lui pardonner ; et ils s’armèrent tous contre sa Comédie avec une fureur incroyable. Ils n’avaient garde de l’attaquer par le côté qui le blessait ; ils couvrirent leurs intérêts de la cause de Dieu ; et le Tartuffe, dans leur bouche, était une Pièce qui offensait la piété. Elle était, d’un bout à l’autre, pleine d’abomination ; et l’on trouvait rien qui ne méritait le feu.
Tartuffe, on lui demanda de quoi il s’avisait de faire des sermons ? « Pourquoi sera-t-il permis, répondit-il, au Père Maimbourg, de faire des Comédies en chaire, et qu’il ne me sera pas permis de faire des sermons sur le Théâtre » ?
Les trois premiers Actes du Tartuffe avaient été représentés à la sixième journée des fêtes de Versailles le douze mai 1664, en présence du Roi et des Reines. Le Roi défendit dès-lors cette Comédie pour le Public, jusqu’à ce qu’elle fût achevée et examinée par des gens capables d’en faire un juste discernement, ajoutant que pour lui, il ne trouvait rien à dire à cette Comédie. Les Faux dévots profitèrent de cette défense pour soulever Paris et la Cour contre la Pièce et contre l’Auteur.
Molière ne fut pas seulement en butte aux Tartuffes ; il avait encore pour ennemis beaucoup d’Orgons, gens simples et faciles à séduire. Les vrais dévots étaient même alarmés, quoique l’ouvrage ne fût guère connu ni des uns ni des autres. Un Curé, dans un livre présenté au roi, décida que l’Auteur était digne du feu, et le damnait de sa propre autorité. Des PrélatsFuretière, 1690). Furetière, 1690).l’Imposteur ; que l’Acteur chargé de ce rôle, portât le nom de Panulphe ; que l’on déguisât le principal personnage sous l’ajustement d’un homme du monde, en lui donnant un petit chapeau, de grands cheveux, un grand colletFuretière, 1690).
Le pauvre homme ; et chaque fois il assaisonnait ce mot d’un ton de voix différent, qui le rendait extrêmement plaisant. Molière, qui, en qualité de Valet de chambre, avait fait le voyage, fut témoin de cette Scène, dont il sut si bien se servir dans son Tartuffe. Le Roi, en écoutant les trois premiers Actes de cette Comédie aux Fêtes de Versailles, ne se rappelait point la part qu’il avait à cette Scène ; Molière l’en fit ressouvenir, et ne lui déplut pas.
Tartuffe, qui a fait un synonyme de plus dans notre langue, avec les mots d’Hypocrite et de Faux-Dévot. Voici ce que la Tradition nous apprend à cet égard. Tartufoli, Signor runtio, Tartufoli. Molière, qui était toujours un Spectateur attentif et observateur, prit de-là l’idée de donner à son Imposteur le nom Tartuffe.
Plusieurs personnes ont écrit que Molière devait au Théâtre Italien l’idée de sa Comédie du Tartuffe. On cite un canevas très-ancien, dont on dit que notre Poète a beaucoup profité. Mais c’est tout le contraire : ce sont les Italiens, et en particulier le Poète GigliGigli, Girolamo : célèbre dramaturge italien de la première moitié du XVIIIe siècle. Il a notamment écrit Don Pilone.Doctor BacchetoneGioanelli, Bonvicino, 1701, Il Dottor Baccheton (Le docteur bigot).Le Tartuffe était bien antérieur aux Farces Italiennes, dont on prétend que Molière a fait usage : c’est ce qui a été vérifié d’une manière à ne laisser aucune doute.
Tartuffe, Ninon admira l’ouvrage et lui fit le récit d’une aventure pareille à celle du Héros de sa Pièce ; mais avec des couleurs si fortes, et des jours si bien ménagés, que Molière, en la quittant, dit avec modestie aussi rare aujourd’hui que les talents, que, si sa Pièce n’avait point été faite, il n’aurait jamais osé la mettre sur la Scène, après avoir entendu le récit de Ninon. L’aventure particulière, dont Mademoiselle de l’Enclos* fit le récit à Molière, est ainsi racontée par M. de Voltaire dans la vie de cette fille célèbre. « Lorsque M. de GourvilleGourville, Jean Hérault de (1625-1703) : financier, entre au service de La Rochefoucauld, parvient au poste de secrétaire ordinaire des finances et se trouve compromis avec Fouquet. Peu scrupuleux d’abord, mais devenu généreux et même bienfaisant, il avait gagné l’amitié de Condé, de Boileau, de Mmede Sévigné. Ses Mémoires « sont les souvenirs d’un homme heureux, dont la vie a été marquée de nombreuses faiblesses et qui montre vis-à-vis de ses contemporains une extrême indulgence, peut-être parce qu’il sentait que lui-même en avait beaucoup besoin » (Bourgeois-André). Il avait épousé secrètement une des trois sœurs du duc de La Rochefoucauld. (DLF XVII, p. 553).
Tartuffe était l’Abbé Roquette, Evêque d’AutunRoquette, Gabriel de (1623 ou 1626, Toulouse – 23 février 1707) : évêque français du XVIIe siècle, qui fut évêque d’Autun de 1666 à 1702, mais également grand vicaire du prince de Conti (1647 ou 1648) et abbé de Cluny. (Wikipédia)Guilleragues, Gabriel de Lavergne, vicomte de (Bordeaux 1628 - Constantinople 1685) : issu d’une bonne famille bordelaise appartenant à la noblesse de robe, il fit ses études au collège de Navarre, avant de revenir à Bordeaux pour y devenir avocat au parlement. Il devint le secrétaire, [...]. Fréquentant salons et ruelles, fidèle adorateur de Mmede Maintenon, lié à tous les écrivains du temps, il obtint la présidence de la Cour des aides de bordeaux en 1660, puis, multipliant les séjours à la cour, devint secrétaire ordinaire de la chambre et du cabinet du roi, lequel le désigna comme ambassadeur en Turquie. Il partit pour Constantinople en 1677, et y mourut en 1685. Auteur de lettres et de poèmes galants (les Valentins), il est surtout le romancier des fameuses Lettres portugaises, publiées en 1669, dont la paternité et le statut ont longtemps constitué une énigme. [...] (DLF XVII, p570-571)
Molière, après avoir lu le Misanthrope à Boileau, lui dit : « Vous verrez bien autre chose ». il mettait alors la dernière main au Tartuffe. Ce trait fait voir la préférence qu’il donnait à ce dernier ouvrage sur l’autre.
Tartuffe au Théâtre. Tout le monde en faisait compliment à Molière : ses ennemis mêmes lui en témoignèrent de la joie, et étaient les premiers à dire que le Tartuffe était de ces Pièces excellentes, qui mettaient la vertu dans tout son jour.
Tartuffe, chez M. de Montmor*, où se trouvèrent aussi M. Chapelain*, M. l’Abbé de Marolles et quelques autres personnes. Je dis à M. le Premier Président de Lamoignon*, lorsqu’il empêcha qu’on le jouât, que c’était une Pièce dont la morale était excellente, et qu’il n’y avait rien qui ne pût être utile au Public ».
Le fameux Père BourdaloueBourdaloue, Père Louis (Bourges 1632 – Paris 1704) : prédicateur français. Après avoir enseigné chez les jésuites, à la société desquels il appartenait, Bourdaloue fit ses débuts de prédicateur en 1666, vint à Paris en 1669 et acquit une grande notoriété auprès de la cour devant laquelle il prêcha très souvent pour le carême et l’avent (de 1670 à 1693). Après la révocation de l’édit de Nantes (1685), il fut envoyé par Louis XIV enseigner les nouveaux convertis du Languedoc ; après 1696, il se voua essentiellement aux œuvres de charité. Prédicateur le plus suivi du XVIIe siècle, Bourdaloue frappait son auditoire par la morale exigeante et le style austère de ses sermons : [...]. Il n’hésitait pas à fustiger les péchés dans des portraits « à clés » (le Sermon sur la médiance, où l’on évoque Pascal ; l’allusion au Grand Arnauld* dans le Sermon sur la sévérité chrétienne ; à Molière et au Tartuffe dans le Sermon sur l’hypocrisie). Ses Sermons et Œuvres diverses (posth. 1707-1734) ont été repris dans une édition de 1822-1826. (Le Petit Robert des noms propres 2007).Tartuffe ; et voici ce qu’on trouve dans son sermon du septième Dimanche après Pâques.
« Comme la vraie et la fausse dévotion ont je ne sais combien d’actions qui leur sont communes ; comme les dehors de l’une et de l’autre sont presque tous semblables, il est non seulement aisé, mais d’une suite presque nécessaire, que la même raillerie qui attaque l’une, intéresse l’autre, et que les traits dont on peint celle-ci, intéressent celle-là ; et voilà ce qui est arrivé, lorsque les esprits profanes ont entrepris de censurer l’hypocrisie, en faisant concevoir d’injustes soupçons de la vraie piété, par de malignes interprétations de la fausse. Voilà ce qu’ils ont prétendu, en exposant sur le Théâtre et à la risée publique un hypocrite imaginaire, et tournant dans sa personne les choses les plus saintes en ridicule ; en lui faisant blâmer les scandales du siècle d’un manière extravagante ; le représentant consciencieux jusqu’à la délicatesse et au scrupule sur des points moins importants, pendant qu’il se portait d’ailleurs aux crimes les plus énormes ; le montrant sous un visage de Pénitent, qui ne servait qu’à couvrir ses infamies ; et lui donnant selon leurs caprices, un caractère de piété le plus austère ; mais, dans le fond, le plus mercenaire et le plus lâche »
La Bruyère, en traçant le caractère du Faux Dévot dans son Chapitre De la Mode, a eu le dessein de critiquer le Tartuffe : nous ne mettrons sous les yeux du Lecteur, que les traits qui frappent ouvertement sur cet ouvrage : « OnuphreOnuphre (La Bruyère, 1688, Caractères) : représente le type du faux dévot, « De la mode ».ma haine et ma discipline : au contraire ; il passerait pour ce qu’il est, pour un hypocrite ; et il veut passer pour ce qu’il n’est pas, un homme dévot. S’il se trouve bien d’un homme opulent à qui il a su imposer, il ne cajole point sa femme ; il est encore plus éloigné d’employer, pour la flatter, le jargon de la dévotion. Ce n’est point par habitude qu’il parle mais avec dessein, et selon qu’il lui est utile, et jamais quand il servirait qu’à le rendre très-ridicule. Il ne pense point à profiter de toute la succession de son ami, ni à s’attirer une donation générale de tous ses biens. Il ne se joue point à la ligne directe ; et il ne s’insinue jamais dans une famille où se trouvent à la fois une fille à pur et un fils à établir ; il y a là des droits trop forts et trop inviolables. »
Le changement le plus marqué qu’on ait fait au Tartuffe, est à ce vers
Ô ciel ! pardonne-lui Coquille : Pardonnez (Anecdotes Dramatiques, 1775) → Pardonne. la douleur qu’il me donne
Il y avait :
Ô ciel ! pardonnez-moi, comme je lui pardonne
Scaramouche Hermite, Pièce très-licencieuse, dans laquelle un Hermite, vêtu en Moine, monte la nuit par une échelle à la fenêtre d’une femme mariée, et y reparaît de temps en temps, en disant : Questo per mortificar la carne.
l’Impromptu de Versailles. Rien de ce qui pouvait rendre l’imitation plus vraie et plus sensible, n’échappait à son attention. Elmire (Tartuffe) : femme d’Orgon.Tartuffe.
Tartuffe : son admiration allait jusqu’à l’extase. À la fin de la Pièce, ses transports de joie augmentant encore, ses voisins lui en demandèrent la raison : « Ah ! Messieurs, s’écria-t-il, si cet ouvrage n’était pas fait, il ne se ferait jamais. »
Tartuffe. »
Les Camarades de Molière voulurent absolument qu’il eût double part, sa vie durant, toutes les fois qu’on jouerait le Tartuffe, ce qui a toujours été depuis régulièrement exécuté.
Racine, 1664, La Thébaïde ou les frères ennemis : tragédie en 5 actes et en vers.Antigone de RotrouRotrou, 1637, Antigone : tragédie en 5 actes et en vers.
Galimatias simple et le Galimatias double il appelait Galimatias simple celui où l’Auteur entendait ce qu’il voulait dire, mais où les autres n’entendaient rien : et le Galimatias double, celui où l’Auteur ne s’entendait pas plus lui-même, qu’il n’était entendu des lecteurs. Il citait par exemple de ce dernier genre de Galimatias, ces quatre vers de la Tragédie de Tite et BéréniceCorneille, 1670, Tite et Bérénice : comédie-héroïque en 5 actes et en vers.
Faut-il mourir, Madame ; et si proche du terme, Votre illustre inconstance est-elle encor si ferme, Que les restes d’un feu, que j’avais cru si fort, Puissent dans quatre jours se promettre ma mort ? v.159-162.
Domitian (Corneille, 1670, Tite et Bérénice) : frère de Tite et l’amant de Domitie.
Amphitryon de Molière. Je ris au point de gober à la renverse. »
En annonçant cette PièceLe Beau de Schosne, 1773, L’Assemblée : comédie en un acte et en vers.
L’Auteur Anglais, qui a traduit dans sa langue L’Avare de Molière, fait ordonner par son Avare, qu’on écrive en lettres d’or cette Sentence qui le charme : « Il faut manger pour vivre, et non pas vivre pour manger »
Molière a puisé dans cette Comédie de BoisrobertBoisrobert, 1653, Boisrobert, François Le Métel, seigneur de (Caen 1589 – Paris 1662) : dramaturge français, quelque temps avocat, il devient le secrétaire de Richelieu. Il fait partie du groupe des Cinq Auteurs, et est à l’origine de l’Académie française où il entre en 1634. Il intervient dans toutes les affaires du monde des lettres, et, en particulier, dans la querelle du Avare ; on reconnaît entre autres celles-ci : ErgasteErgaste (Boisrobert, La Belle plaideuse, 1653) : amant de Corine et fils d’Amidor.Corine (Boisrobert, La Belle plaideuse, 1653) : maîtresse d’Ergaste.
…… Il sort de mon étude ; Parlez-lui Quoi ! C’est-là celui qui fait le prêt ? Oui, Monsieur Quoi ! C’est-là ce Payeur d’intérêt ? À son fils Quoi ! C’est donc toi méchant, filou, traîne-potence ? C’est en vain que ton œil évite ma présence. Je t’ai vu. Qui doit être enfin le plus honteux, Mon Père ? Et qui paraît le plus sot de nous deux ? Etc. La Belle Plaideuse, Acte I, scène 8.
Une aventure extraordinaire fournit le sujet de cette ComédieLa Fausse Clélie ou l’inconnu : comédie, d’un auteur anonyme (selon les Anecdotes Dramatiques)
C’est par les critiques fines et judicieuses, dont cette Pièce [L’Impromptu de Versailles] est parsemée, que Molière a ouvert les yeux des Comédiens sur les défauts et les beautés de leur art. En reprochant à MontfleuryMontfleury, pseudonyme de Zacharie Jacob (en Anjou 1600 – Paris 1667) : comédien français de l’Hôtel de Bourgogne à partir de 1638. fils de comédiens, marié à une comédienne qui lui donnera six enfants ; deux seront comédiennes et un deviendra auteur dramatique. Tragédien apprécié du public et de la cour malgré sa rondeur, interprète de Pierre Corneille surtout, il était célèbre pour sa déclamation retentissante, dont Molière s’est moqué dans l’Impromptu de Versailles. Il est l’auteur d’une tragédie, la Mort d’Asdrubal, en 1647. (DET, C. Scherer p. 1134.)Préville, pseudonyme de Pierre Louis Dubus (Parsi 1721 – Beauvais 1799) : acteur comique français. Fils d’un tapissier, Préville s’enfuit et devient comédien de campagne. Jean Monnet l’engage à l’Opéra-Comique en 1743 puis il tourne en province, avant de débuter à la Comédie-Française en 1753. C’est le grand acteur comique du XVIIIe siècle ; Garrick l’appelle l’« enfant de la nature ». Il joue beaucoup et crée plus de soixante rôles dont le Figaro de Barbier de Séville, avant de prendre sa retraite en 1786. Il est un des créateurs de l’École royale de déclamation, et le maître de la plupart des comiques des générations suivantes. Honnête homme, bon époux et père de famille, c’est un modèle d’acteur bon citoyen et respecté. Il rejoue en 1791-1792 et en 1794-1795. Sa femme, Madeleine Drouin MmePréville (Le Mans 1731- Senlis 1794) joue à la Comédie-Française de 1756 à 1789. (DET, M. de Rougemont p. 1332).
Frédéric II le Grand (Berlin 1712 – Potsdam 1786) : roi de Prusse de 1740 à 1786.
CerclePoinsinet, Antoine-Alexandre-Henri (Fontainebleau, 1735 – Cordoue, 1769. Poète et dramaturge) : dramaturge. Fils du notaire du duc d’Orléans, il montra de bonne heure un goût très vif pour la poésie et le théâtre : à dix-huit ans, il faisait applaudir une parodie, Totinet. Sa courte vie fut laborieuse : il a composé de nombreuses pièces, parodies et opéras-comiques, et des Épîtres en vers. Il voyagea en Italie en 1760 et, en 1769, il était en Espagne avec une troupe d’acteurs et de chanteurs français et italiens, lorsque, prenant un bain après son repas, il se noya dans le Guadalquivir à Cordoue. [...]. Des anecdotes le montrent mystifié : membre des académies de Dijon et des Arcades de Rome, il rêve de l’être aussi de celle de St-Pétersbourg ; son entourage lui fait espérer cet honneur, à la condition qu’il sache le russe ; il travaille pendant six mois avant de se rendre compte qu’il étudie un manuel de bas-breton. (DLF XVIII p. 1046).Poinsinet, 1771, Le Cercle ou la soirée à la mode : en 1 acte et en prose.Misanthrope ».
Louis XIV demanda à Racine, à Quinault* et à Molière, un sujet où pût entrer une décoration, qui représentait les enfers, et que l’on conservait avec soin dans le garde-meuble. Racine proposa le sujet d’Orphée, Quinault* l’Enlèvement de Prosperpine, et Molière, aidé du grand Corneille, s’attacha au sujet de Psyché, qui obtint la préférence. La Grange-ChancelLagrange-Chancel, François Joseph de Chancel sieur de Lagrange, dit (Périgueux 1677 – Antoniac 1658) : auteur dramatique et pamphlétaire français. Ce brillant mais pauvre aristocrate périgourdin, présenté à la cour à quatorze ans, reçoit des leçons de Racine et fait jouer sa première tragédie à la Comédie-Française en 1694. Une demi-douzaine d’autres suivra, ainsi que quelques opéras. Orgueilleux, agressif, il s’attire de mauvaises affaires, se venge en lançant contre le Régent ses Philippiques, s’évade du fort de Sainte-Marguerite après quatre ans de prison, et ne pourra rentrer en Périgord qu’en 1729 : sa carrière théâtrale parisienne est terminée. Ses tragédies, dont Amasis (1701) et Ino et Mélicerte (1713) ont le plus marqué, allient à la poétique racinienne un piment romanesque et cruel. (DET, M. de Rougemont p. 952).
Le Roi du Portugal a fait traduire notre Tartuffe, l’a fait représenter à Lisbonne ; et la Pièce à eu le plus grand succès.
Armand, François Huguet, dit (Richelieu, 1er juin 1699 – Paris, 26 décembre 1765) : comédien de grande réputation, auquel le roi accorda une pension. Quelques-unes de ses nombreuses productions furent imprimées. Un divertissement en vaudevilles, l’Heureux Événement en collaboration avec Derozée, fut joué à Versailles le 23 décembre 1751. il eut deux fils comédiens qui prirent son pseudonymes : Armand aîné débuta en 1759 et Armand jeune en 1771. [...] ( DLF XVIIIe siècle, p. 86).Tartuffe. « Figurez vous, les bons amis, leur disait-il, un honnête Gentilhomme, qui retire chez lui un misérable, à qui il donne sa fille avec tout son bien, et qui, pour le récompenser de ses bontés, veut séduire sa femme, le chasser de sa propre maison, et se charge de conduire un Exempt
Remettez-vous, Monsieur d’une alarme si chaude.
« Que diable ! C’est le sujet du Tartuffe que tu nous débites ! Eh ! Oui, mes amis. A-t-on si grand tort de dire que nombre de Comédiens ne connaissent que leur rôle, même dans les Pièces qu’ils représentent journellement ? »
Béjart*, (Armande-Gresinde-Claire-Élisabeth), épousa en première noces Molière, en secondes Guerin Détriché : elle était très-aimable, jouait supérieurement dans le comique noble, chantait avec des grâces et un goût qui lui ont attiré, dans son temps, autant d’adorateurs que d’applaudissements. Elle quitta le Théâtre le 14 Octobre 1694, et mourut le 3 Novembre 1700. La Demoiselle Béjart sa mère, qui avait épousé en secret le sieur de ModèneModène, Esprit de Rémond de Mormoiron, comte de (1608-1672) : gentilhomme du Comtat-Venaissin [, fils de François de Rémond, protégé de Luynes, puis de Gaston d’Orléans, mort en 1632 [...]. Il s’attacha à la fortune du duc de Guise et participa avec une exceptionnelle valeur à l’aventureuse expédition de Naples. Il en a laissé le récit auquel on a voulu que Molière ait collaboré. Amant de Madeleine Béjart, dont il eut une fille qu’on propose parfois identifier avec Armande Béjart, il finit par épouser une autre comédienne de la troupe de Molière, Madeleine l’hermite […]. (DLF XVII, p861)
Ducroisy*, (Philippe Gassaud), Gentilhomme du pays de Beauce, était avec distinction, à la tête d’une Troupe de Comédiens de Province, lorsqu’il se joignit à celle de Molière, qui, peu de temps après, vint à Paris. Ducroisy* y fut un des meilleurs Acteurs de la Troupe du Palais Royal ; et ce fut pour lui que Molière composa le rôle de Tartuffe, que Ducroisy* joua au gré de l’Auteur et des Spectateurs. Plusieurs années après la mort de Molière, Ducroisy*, étant goutteuxFuretière 1690).
Hubert* (André) Acteur François, mort en 17…. Il était l’original de plusieurs rôles qu’il représentait dans les Pièces de Molière ; et comme il était entré dans le sens de ce fameux Auteur, par qui il avait été instruit, il y réussissait parfaitement. Jamais Acteur n’a porté si loin les rôles d’homme en femme. Celui qu’il représentait dans les Femmes Savantes, Mde. JourdainBourgeois Gentilhomme ; et Mde. JobinDevineresseCorneille, Thomas et Donneau de Visé, Jean, 1679, La Devineresse ou les faux enchantements : comédie en 5 actes, en prose et musique.Vicomte de l’Inconnu, ainsi que dans ceux des Médecins, et des Marquis ridicules. Les rôles de femme, que Hubert* jouait, furent donnés à Mlle Beauval.
La GrangeLa Grange, pseudonyme de Charles Varlet (Amiens 1635 – Paris 1692) : comédien français de la troupe de Molière à partir de 1659. Spécialisé dans les rôles de jeune premier, il est surtout connu comme auteur du célèbre « registre », [...]. La Grange tint pendant plus de trente ans jusqu’à la mort de Molière, mais aussi après, une place essentielle dans la troupe. Orateur chargé à la fin du spectacle de présenter devant le public la pièce suivante, économe, secrétaire, il sut représenter et défendre la troupe à la cour et dans des procès, surtout après 1673. Il se marie tard à trente-sept ans en 1672 avec Marie Ragueneau, fille du pâtissier poète. Il meurt subitement à cinquante-sept ans. (DET, C. Scherer, p. 952).Furetière, 1690).
Molière (Jean-Baptiste Poquelin, si célèbre sous le nom de) né à Paris en 1620, mort en 1673, était fils et petit-fils de Valet-de-chambre Tapissier du Roi. Il passa quatorze ans dans la maison paternelle, où l’on ne songea qu’à lui donner une éducation conforme à son état. Sa famille, qui le destinait à la charge de son père, en obtint pour lui la survivance ; mais il conçut un dessein fort opposé aux vues de ses parents : il demanda instamment, et on lui accorda avec peine, la permission d’aller faire ses études au Collège de Clermont. Il remplit cette carrière dans l’espace de cinq ans, pendant lesquels il contracta une étroite liaison avec Chapelle*, Bernier* et Cyrano*.
Le voyage de Louis XIII à Narbonne en 1641, interrompit des occupations d’autant plus agréables pour lui, qu’elles étaient de son choix. Son père, devenu infirme, ne pouvant suivre la Cour, son fils y alla remplir les fonctions de sa charge, qu’il a depuis exercée jusqu’à sa mort ; mais à son retour à Paris, il céda à son étoile, qui le destinait à être Paris parmi le Restaurateur de la Comédie.
Le goût pour les Spectacles était presque général en France, depuis que le Cardinal de Richelieu avait accordé une protection distinguée aux poètes dramatiques. Plusieurs sociétés particulières se faisaient un divertissement domestique de jouer la Comédie. Poquelin entra dans une de ces sociétés, qui fut connue sous le nom de l’Illustre Théâtre. Ce fut alors qu’il changea de nom, pour prendre celui de Molière, soit par égard pour ses parents, qui désapprouvaient cette profession, soit pour suivre l’exemple de plusieurs de ses Camarades. La Béjart, Comédienne de Campagne, se l’associa ; et bientôt liés par les mêmes sentiments, leurs intérêts furent communs : ils formèrent de concert une Troupe, et partirent pour Lyon. On y représenta l’Étourdi, qui enleva presque tous les Spectateurs au Théâtre d’une autre Troupe de Comédiens établis dans cette ville. Quelques-uns d’entre eux prirent parti avec Molière, et le suivirent en Languedoc, où il offrit ses services au Prince de Conti*, qui tenait à Béziers les États de la Province. Illustre Théâtre, qu’il avait plusieurs fois mandé chez lui.Étourdi reparut à Béziers avec un nouveau succès ; le Dépit Amoureux et les Précieuses Ridicules y entraînèrent tous les suffrages ; on donna même des applaudissements à quelques Farces, qui, par leur constitution irrégulière, méritaient à peine le nom de Comédies, telles que le Docteur amoureux, les Trois Docteurs Rivaux, etc. Molière les a probablement supprimées, parce qu’il sentit qu’elles ne pourraient lui acquérir le degré de réputation auquel il aspirait. Dans les fréquents voyages qu’il fit à Paris, où il avait dessein de se fixer, il eut accès auprès de Monsieur, qui le présenta au Roi et à la Reine mère. Il joua en présence de leurs Majestés, et obtint la permission de jouer dans la Salle des Gardes du vieux Louvre, et ensuite dans celle du Palais Royal. Enfin sa Troupe fut arrêtée au service du Roi en 1665 ; et ce fut alors, que l’on vit régner le vrai goût de la Comédie sur le Théâtre Français.
Les Pièces de Molière sont l’Étourdi, le Dépit amoureux, les Précieuses ridicules, le Cocu imaginaire, Dom-Garcie de Navarre, l’École des maris, l’École des femmes, les Fâcheux, la Critique de l’École des femmes, l’Impromptu de Versailles, la Princesse d’Élide, le Mariage forcé, le Tartuffe, le Festin de Pierre, l’Amour médecin, le Misanthrope, le Médecin malgré lui, Mélicerte, le Sicilien, Amphytrion, George-Dandin, l’Avare, Pourceaugnac, les Amants magnifiques, Psyché, le Bourgeois Gentilhomme, les Fourberies de Scapin, les Femmes Savantes, la Comtesse d’Escarbagnas, et le Malade imaginaire. Molière avait encore composé, pour la Province et pour Paris, plusieurs petites Farces, comme le Docteur amoureux, le Docteur pédant, les Trois Docteurs Rivaux, le Maître d’École, le Médecin volant, la Jalousie de Barbouillé, la Jalousie du Gros-René, Gorgibus dans le sac, le Fagoteur, le Grand benêt de Fils, Gros-René petit enfant, etc, qui n’ont pas été imprimées.
Le rang que Molière doit occuper dans l’empire littéraire, est réglé depuis longtemps. Pour juger du mérite de ses ouvrages, il suffit de les comparer avec tout ce que l’antiquité offre de plus parfait dans ce genre. Plus l’examen sera approfondi, plus la supériorité de ce grand homme sera reconnue. Il puisa chez les Anciens les premières notions de l’Art qu’il devait perfectionner : il leur dut ce goût sûr, qui éclaira son génie, et lui fit surpasser tous les modèles. Bientôt il n’en voulut avoir d’autre que son génie même. La Nature et les ridicules de son siècle lui parurent une source inépuisable ; il en tira cette foule de tableaux si différents entre eux, et si ressemblants avec les objets qu’il avait voulu peindre. La Comédie prit une nouvelle forme, et s’anoblit entre ces mains. Il étudia le génie des Grands, les fit rire de leurs défauts, et osa substituer nos Marquis aux Esclaves des Anciens. Ces derniers ne jouaient sur leur Théâtre, que la vie commune et bourgeoise ; Molière joua sur le nôtre la Ville et la Cour. Spectateur philosophe, rien n’échappait à ses regards ; il est peu de condition, où il n’ait pas fouillé, peu de vices dans la société qu’il n’ait repris ; personne enfin n’a si bien connu l’art de trouver le ridicule des choses les plus sérieuses. Il allait le saisir où d’autres ne l’eussent pas même soupçonné. Aussi a-t-il joui d’un avantage bien rare, celui de réformer une partie des abus qu’il attaquait. Le jargon des Précieuses ridicules disparut ; celui des Femmes Savantes devint intelligible. On cessa de turlupiner à la Cour, et de se guinder à la Ville. On vit encore, je l’avoue, des avares et des hypocrites ; c’est qu’un vice est plus difficile à réformer qu’un ridicule, et que souvent on en rougit moins. Il faut convenir cependant que, même dans les chefs-d’œuvre de Molière, on souhaiterait un langage plus épuré, et des dénouements plus heureux. On lui reproche encore de s’être trop occupé du Peuple, dans quelques-unes de ses Comédies ; et ce reproche est fondé ; mais il faut envisager les circonstances. Molière, chef d’une Troupe de Comédiens, avait besoin de plaire à la multitude, sans laquelle une pareille Troupe ne peut vivre : il était même souvent obligé d’amuser la Cour, qui, avec un goût délicat, aime encore plus à rire qu’à admirer. Il faut, d’ailleurs, distinguer les genres : le Médecin malgré lui, Pourceaugnac, les Fourberies de Scapin, etc, ne peuvent entrer en parallèle avec le Misanthrope, le Tartuffe, les Femmes Savantes, etc ; mais plus d’un trait, dans ces premières productions, décèle le génie qui enfanta les secondes. Molière, en introduisant le bon goût sur la scène comique, n’avait pu en bannir entièrement le mauvais ; il était obligé d’encenser quelquefois l’idole qu’il voulait renverser. En un mot, il imitait la sagesse de certains Législateurs, qui, pour accréditer de bonnes lois, se soumettent eux-mêmes à d’anciens abus.
Molière récitait en Comédien sur le Théâtre et hors du Théâtre ; mais il parlait en honnête-homme, riait en honnête-homme, avait tous les sentiments d’un honnête-homme. Despréaux trouvait la prose de Molière plus parfaite que sa Poésie, en ce qu’elle était plus régulière et plus châtiée, au-lieu que la servitude des rimes l’obligeait souvent à donner de mauvais voisins à des vers admirables : voisins que les Maîtres de l’Art appellent des Frères Chapeaux.Bolaeana datant 1742. « Au reste Monsieur Despréaux* trouvait la prose de Molière plus parfaite que la Poésie, en ce qu’elle était plus régulière et plus châtiée, au lieu que la servitude des rimes l’obligeait souvent à donner de mauvais voisins à des vers admirables, voisins que les maîtres de l’Art appellent des Frères Chapeaux (I) Allusion à des moines qui ont leur suite quelque petit Frère qui porte le chapeau ». Nous avons choisi de classer l’anecdote du Bolaeana dans la catégorie : Jugements d’auteurs.
Grâces dans Psyché en 1671, a donné ce portrait de Molière. « Il n’était ni trop gras ni trop maigre. Il avait la taille plus grande que petite, le port noble, la jambe belle, il marchait gravement, avait l’air très-sérieux, le nez gros, la bouche grande, les lèvres épaisses, le teint brun, les sourcils noirs et forts, et les divers mouvements qu’il leur donnait, lui rendaient la physionomie extrêmement comique. À l’égard de son caractère, il était doux complaisant, et généreux. Il aimait fort à haranguer ;
À peine Molière fut mort, que Paris fut inondé d’épitaphes à son sujet ; toutes assez mauvaises, à l’exception de celle que le célèbre La Fontaine composa, et d’une Pièce de vers du P. Bouhours.
Vers du P. Bouhours sur Molière.
Ornement du Théâtre, incomparable Acteur, Charmant Poète, Illustre Acteur, C’est toi, dont les plaisanteries Ont guéri du Marquis l’esprit extravagant : C’est toi qui, par tes momeries. A réprimé l’orgueil du Bourgeois arrogant Ta Muse, en jouant l’hypocrite, A redressé les faux Dévots ; La Précieuse, à tes bons mots, A reconnu son faux mérite ; L’homme ennemi du genre humain, Le Campagnard, qui tout admire, N’ont pas lu tes écrits en vain : Tous deux se sont instruits, en ne pensant qu’a rire. Enfin tu réformas la Ville et la Cour : Mais quelle fut ta récompense ? Les Français rougiront un jour De leur peu de reconnaissance. Il leur fallait un Comédien Qui mit, à les polir, son art et son étude ; Mais, Molière, à ta gloire il ne manquerait rien, Si, parmi leurs défauts, que tu peignis si bien, Tu les avais repris de leur ingratitude.
Sous ce tombeau gisent Plaute* et Térence* ; Et cependant le seul Molière y gît. Leurs trois talents ne formaient qu’un esprit, Dont le bel Air réjouissait la France Ils sont partis ; et j’ai peu d’espérance De les revoir, malgré tous nos efforts. Pour un longtemps, selon toute apparence, Térence* et Plaute* et Molière sont morts.
Un Abbé présenta à M. le Prince l’Épitaphe suivante, dont on a parlé au bas de la page 507, du Second Tome de cet ouvrageAnecdotes Dramatiques mais dans le tome I.
Ci-gît qui parut, sur la scène, Le singe de la vie humaine, Qui n’aura jamais son égal ; Mais voulant de la mort, ainsi que de la vie, Être l’Imitateur, dans une Comédie, Pour trop bien réussir, il réussit très-mal ; Car la Mort, en étant ravie, Trouva si belle la copie Qu’elle en fit un original.
Tartuffe, lorsqu’il arriva une défense du Parlement de jouer cette Comédie. « Messieurs, dit Molière en s’adressant à l’assemblée, nous comptions aujourd’hui avoir l’honneur de vous donner le Tartuffe ; mais M. le Premier Président ne veut pas qu’on le joue ».
Quoique Molière fût très agréable en conversation, lorsque les gens lui plaisaient, il ne parlait guère en compagnie, à moins qu’il ne se trouvât avec des personnes pour qui il eût un estime particulière. Cela faisait dire à ceux qui ne le connaissaient pas, qu’il était rêveur et mélancolique ; mais s’il parlait peu, il parlait juste. D’ailleurs il observait les manières et les mœurs, et trouvait le moyen ensuite d’en faire des applications admirables dans ses Comédies, où l’on peut dire qu’il a joué tout le monde, puisqu´il s’y est joué le premier en plusieurs endroit, sur ce qui se passait dans sa propre famille.
Mignot, Jean dit Mondorge : comédien français. On sait peu de chose sur sa vie. Sa mère se nomme Jeanne Imbert et son père Étienne Mignot. Le 28 février 1666, il se marie avec Angélique Messa. Il meurt en 1678. (César.org).
Le Grand-Condé* disait que Corneille était le Bréviaire des Rois ; on pourrait dire que Molière est le Bréviaire de tous les hommes.
Furetière, 1690).Albert de Luynes, Charles-Honoré d’, duc de Chevreuse (7 octobre 1646 – 5 novembre 1712), militaire français. Il était conseiller de Louis XIV à titre privé. (Wikipédia).
Molière était désigné pour remplir la première place vacante à l’Académie Française. La Compagnie s’était arrangée au sujet de sa profession : il n’aurait plus joué que des rôles de Haut-Comique ; mais sa mort précipitée le priva d’une Place bien méritée, et l’Académie d’un sujet si digne de la remplir. Ce fait est attesté par une note de l’Académie Française.
Richelet, 1680).
Somaise*, (Antoine Bodeau de) vivait du temps de Molière, dont il se déclara l’ennemi ; il l’attaqua dans toutes ses Préfaces, et fit contre lui les Véritables précieuses, le Procès des précieuses ; il mit en Vers les Précieuses ridicules.
Un Acteur, jouant le rôle d’Harpagon dans cette Pièce, se laissa tomber en courant, et en criant au voleur, à la Scène de la Cassette